"Remember, when you don’t know what to do, it never hurts to play Scrabble."
Énorme déception pour ma part.
Magic for Beginners est un recueil de nouvelles assez inégal. Mais ça, je ne le savais pas au début. Je me suis lancé dans la première nouvelle - ma préférée - the Faery Handbag - tout joyeux, absolument ravi par l'inventivité, la fraicheur du ton et le style décalé de l'auteur. Et quand j'ai terminé la nouvelle, j'ai cru avoir terminé le premier chapitre. Car oui, les nouvelles ne semblent jamais vraiment terminées et le potentiel de chacune est suffisant pour faire un roman assez correct.
Frustré, j'ai donc continué ma lecture. Les nouvelles suivantes sont souvent incompréhensibles. C'est voulu : on a l'impression d'être dans un rêve. Le temps coule dans l'autre sens, le narrateur change en cours de phrase. Rien n'est logique. C'est déroutant et différent, original, mais c'est illisible et un peu désagréable. On ne sait pas trop ce que l'on lit. Et aussi abruptement que cela a commencé, la nouvelle se termine. Alors certes, Kelly Link a du talent, des idées et sait manier la langue, mais je trouve vraiment qu'elle s'échine à rechercher la forme pour la forme, l'originalité à tout prix, au détriment du plaisir de la lecture. Être dérouté, perdu dans un livre est quelque chose d'assez courant et qui demande un certain savoir-faire pour être transcrit. Sauf qu'à force de trop tirer sur la corde à aligner les nouvelles (assez longues en plus) où il n'y a que ça, j'ai fini par me lasser. C'est un peu comme si Kelly Link sachant très bien faire quelque chose le refaisant encore et encore (en anglais on appelle ça un one-trick pony). C'est vraiment dommage, parce que chacune des nouvelles fourmille d'idées originales et amusantes. Même The Cannon.
Les différentes nouvelles sont très difficiles à résumer mais ça parle de zombies, de séries télé qui n'existent pas, de couples en crise, du diable, de chats et de sorcières... on pourrait ranger ça dans une sorte de fantaisie urbaine. C'est assez bizarre mais j'étais on ne peut plus partant pour le voyage.
Finalement, la juxtaposition des différentes nouvelles dans le recueil fait plus de mal à Kelly Link que de bien: on a la preuve de son imagination fertile mais aussi du côté un peu trop surfait de son style qui ne se renouvelle pas. J'oserais presque une comparaison avec les nouvelles de Borges, qui elles aussi arpentent le terrain des rêves et renouvellent en profondeur ce que peut être une nouvelle. Seulement les nouvelles d'un recueil comme l'Aleph par exemple se complètent les unes les autres, sans qu'aucune diminue la force de l'autre (même s'il est inévitable d'en préférer une à l'autre). C'est malheureusement le contraire ici et on peut s'interroger sur le choix des différentes nouvelles - mises bout à bout, sans vraiment de justification. Sans doute l'éditeur s'est-il dit que 9 nouvelles, cela faisait un recueil raisonnable.
Mes notes, nouvelles par nouvelles :
"The Faery Handbag" - 9/10
"The Hortlak" - 4/10
"The Cannon" - 3/10
"Stone Animals"- 5/10
"Catskin" - 6/10
"Some Zombie Contingency Plans" - 6/10
"The Great Divorce" - 8/10
"Magic for Beginners" - 6/10
"Lull" - 4/10
On constatera que la note finale est tout sauf une moyenne arithmétique. J'utilise moi aussi ma licence poétique.