Dans un jeu de quilles
Philippe Djian dit être plus intéressé par le style que par les intrigues. On n'est pas obligé de le croire mais il est vrai que son dernier roman, Marlène, est ciselé avec l'amour d'un tailleur de...
le 1 avr. 2017
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La lecture du nouveau roman de Philippe Djian me laisse circonspect. Son précédent "Dispersez-vous, ralliez-vous", ne m'avait pas emballé. Celui-ci m'est apparu plus inspiré sans pour autant me convaincre, le texte souffrant de scories et de tics d'écriture un peu agaçants.
Si l'on ne regarde que l'histoire, le roman s'avère être un tourne-pages efficace. Des personnages bien typés, évoluant dans un endroit imprécis, mix d'Usa et sud de la France, se confrontent à une vie tourneboulée par un passé de soldats en Afghanistan pour les hommes et à une sexualité en questionnement pour les femmes. Puis vient se greffer une troisième femme, soeur d'une des personnages principales, Marlène. Marlène est une sorte de godiche myope, un peu paumée, qui va jouer la chienne folle dans un jeu de quilles ( et ça tombe bien car un des personnages travaille dans un bowling!). Le roman avance par rebondissements façon sitcom, conservant toujours son côté mystérieux au personnage du titre et distillant une atmosphère poisseuse. Proche du roman noir, du thriller, on se dit que ça peut exploser à tout moment. De ce côté là, le roman est taillé pour se vendre en nombre à la maison de la presse de Royan.
Mais, hélas, il y a aussi l'écriture... Je sais que là je touche un point sensible et que je risque de passer pour un petit lecteur, puisque la communication autour du livre semble tourner autour de deux points essentiels : la difficulté de vivre pour les soldats de retour d'un conflit en terre afghane ( certes en toile de fond mais pas une étude poussée non plus ) et le style de notre grand auteur beat génération à la française. Et là, je coince !
Son précédent roman s'était essayé à la narration éclatée ( des événements avait eu lieu sans que l'on en soit prévenu, puis décrit un peu tard ) peu convaincante. Dans "Marlène", il a digéré le procédé et semble revenir vers la technique du " sans"... Petit retour historique.... A ses débuts, dans les années 80, "37,2 le matin" ou "Bleu comme l'enfer" avait défrisé les vieux critiques ou les lecteurs classiques par la suppression du "ne" en tant que marqueur de négation. En 2017, la principale figure de style tourne autour d'une nouvelle suppression, celle des signes de ponctuation de dialogue ( guillemets et/ou tirets quand un personnage parle). Pourquoi pas ? Cela oblige le lecteur à rester attentif car d'un description on passe sans crier gare à un dialogue ... Cela rend la lecture un peu perturbante, surtout au début du roman où, je l'avoue avoir été un peu perdu. Pas facile pour moi, de bien situer les personnages. Qui vit où ? Qui couche avec qui ? Mais au fur et à mesure que les chapitres s'allongent, comme les phrases ( une autre figure de style?) on s'habitue bien. J'ai fini aussi par m'habituer aux nombreux virages que prend la narration. Dans un même paragraphe, un passage à la ligne nous envoie ailleurs, chez un autre personnage, un autre lieu voire une autre époque, sans que rien dans le texte ne le signale. Là encore, il est sympa Mr Djian, il fait travailler notre cerveau, on reste en éveil ! ( mais attention, cela peut aussi rebuter un lecteur).
La fin sur le blog
http://sansconnivence.blogspot.fr/2017/03/marlene-de-philippe-djian.html
Créée
le 17 mars 2017
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