Avant le 11 septembre 2001, on ignorait tout d'une histoire longue faite de politique et de combat. Seule, et encore, l'invasion de l'Afghanistan par l'Union soviétique le 29 décembre 1979 avait permis à certains de «voir» ce pays qui ne connaissait aucune contrainte liée aux grandes puissances.
Les Afghans étaient des éleveurs. Avec les attaques soviétiques, chaque Afghan est devenu un moudjahidin défendant sa vallée.
Plus de dix ans plus tard, les forces d'occupation soviétiques sont tombées.
1992 prise de kaboul dans le sang et mise en place d'un gouvernement d'union national.
En 1996, le pouvoir retombe aux mains des talibans, Massoud ayant été malheureusement pris entre son combat pour la liberté et ses alliances nécessaires pour y arriver. Viendra la trahison.
Massoud retourne alors en résistance dans les montagnes.
Le régime des talibans imposé par la force du Pakistan et surtout l’inintérêt du monde laisse Massoud de nouveau seul.
La stratégie de Ben Laden voulant s’accaparer les lauriers de la lutte anti-soviétique et justifier ainsi de son intégrisme. Massoud étant le seul légitime à avoir gagner cette bataille, Il fallait s’en débarrasser. En même temps la lutte de Massoud pour la liberté n’est pas permise. Le pays pourrait de nouveau se diriger avec Ben Laden, vers un fondamentalisme arriéré.
Et puis en mars 2001, les grands bouddhas de la vallée de Bamyan sont détruits suivi en septembre 2001 de l’attentat aux Etas-Unis, le message se profile et la menace avec. Un attentat-suicide fit mourir Massoud le 9 septembre 2001, deux jours avant la date fatidique. Ce signal, l’Occident ne l’a pas entendu. Mais après l’attentat du 11 septembre là, l’Afghanistan se rappela alors à notre bon souvenir. La riposte américaine du 7 octobre, appuyée par la France mais surtout par les résistants afghans qui, par leur intelligence et leur persévérance, ont permis en novembre de se libérer du joug Taliban.
Michael Barry, spécialiste de l’Afghanistan et de la littérature persane, écrit quelques mois après l’assassinat de A.S.Massoud de «L’islamisme à la Liberté» et s’attache à nous rendre compte avec toute l’objectivité possible d’un tel personnage et reprend son cheminement qui en fera un étudiant, un chef de guerre et fin stratège, tenté par l’islamisme pour ensuite le combattre pour la liberté.
Massoud reste profondément un homme de foi mais sera le seul dans toute l’histoire musulmane à prôner les droits fondamentaux humains. Selon l'écrivain, Massoud, amateur de poésie, "avait découvert la sève mystique, tolérante, soufie de l'islam, méditant quotidiennement la philosophie médiévale d'al-Ghazali ainsi que les poèmes de Hafez visant à établir avec le monde musulman une meilleure compréhension mutuelle."
Avant d’être l’ami de Massoud, Barry avait de sérieux doutes quant aux motivations du commandant qu’il jugeait bien floues mais force a été de constater son acharnement pour le peuple afghan et sa légitimité. On comprendra alors que les «soupçons» qui pèsent sur Massoud ne sont que pure stratégie dans un pays où il lui faudra ruser pour avancer.
Massoud a été accusé d’avoir volé les richesses locales (émeraude) pour financer sa guerre. Le Pakistan finançait de son côté les Talibans. Et de dire «Car qui d’autre nous défendrait ?».
A l’instar de Christophe de Ponfilly qui met en image ce pays et son commandant «du Nord», de Reza qui fera de lui de beaux portraits, chacun est tombé «amoureux» de l’homme et à leur manière ont permis à ce personnage de sortir de l’ombre pour son message de paix et pourtant complètement ignoré.
L’écrivain nous donne des références à l'Islam, à la philosophie ou encore aux auteurs persans ou autre chef de guerre. On remonte au 19ème siècle avec Ahmad Khân, moderniste pour un islamisme ouvert au monde. A l’image de Rabbâni fin stratége et manipulateur Massoud n’échappera pas à la comparaison. De la même manière son attrait pour le poête indo-musulman Ghâleb de Delhi ambigu personnage, ne l'empêche pas de faire ses choix.
Il en profite pour nous faire un peu d’histoire en mettant en évidence l’importance des frontières avec notamment la ligne «Durand» qui délimite l’Afghanistan et l’empire Britannique. La vallée du Panshir et le haut Val lieu de repli stratégique de ses troupes, et sur le sud qu’il qualifiera de résigné face aux talibans.
Barry pointe également la manipulation des médias quant à la retranscription souvent biaisée de la situation pour empêcher Massoud de rendre compte de la situation de son pays et de la menace islamiste.
Un livre qui se lit rapidement pour un bon retour sur l’histoire du pays et sur Massoud. L’écriture est à la fois soignée, fluide et les mots choisis pour une étude simple mais percutante. Reste un ouvrage qui reprend la trame documentaire aux multiples informations à digérer.
Aujourd’hui alors que Massoud a étudié en France, pratiquement aucun Afghan ne vient plus étudier chez nous. La reconstruction de l’Afghanistan est de nouveau oubliée.
Comme le dit l’auteur lui-même en fin d’ouvrage
"Un résistant issu d'une archaïque société paysanne, profondément convaincu de sa foi, défendait, plus ou moins habilement, une indépendance nationale et maintenait ces mêmes droits les plus élémentaires (notamment celui des femmes d'étudier, travailler, de diriger, d’être soignées) quand toutes les puissances mondiales se liguaient contre lui, ou préféraient l'ignorer»