Entre deux boues
Minnow, dont un pêcheur traduirait le nom par blanchaille, c’est le héros de ce récit, une douzaine d’années à tout casser et pas beaucoup plus de bon sens qu’un Petit Poucet au début de l’histoire...
Par
le 4 mai 2020
Minnow, dont un pêcheur traduirait le nom par blanchaille, c’est le héros de ce récit, une douzaine d’années à tout casser et pas beaucoup plus de bon sens qu’un Petit Poucet au début de l’histoire. Et s’il est plutôt attachant, ce n’est pas forcément affectivement, mais presque de force, notamment parce que sa naïveté recoupe forcément l’innocence présumée du lecteur : les réponses aux avertissements qu’on lui adresse et aux questions qu’on lui pose pourraient être celles du lecteur face à l’auteur : « “Fais attention. Ici, c’est pas comme en ville. / – Je sais m’sieur. / – Non, t’en sais rien du tout.” » (p. 77) ou « “[…] Et là, tu as peur ? / […] “Non, m’sieur. J’ai juste un peu l’impression d’être dans un autre monde.” » (p. 158).
Sa mission ? Chercher un médicament pour son papa. Le cadre ? Une sorte de Louisiane ou de Caroline du Sud floue, entre le Mississippi de Tom Sawyer et… et je ne sais pas trop où. Les autres personnages ? Des gentils, des méchants, des morts, des vivants, et un certain nombre dont on ne sait pas s’ils sont gentils ou méchants, morts ou vivants. Des fantômes peut-être : « Toute la scène se déroula dans un brouillard peuplé d’ombres » (p. 87).
Minnow présente un drôle d’univers, intrigant à coup sûr, mais qui m’a paru soit trop confus, soit pas assez pour qu’on s’y immerge pleinement. Et au bout du compte / conte, pas assez étrange pour être marquant tout du long. Peut-être cela vient-il du fait que ce n’est ni tout à fait un roman, ni tout à fait un conte, empruntant à l’un et à l’autre genre. (Un autre livre récent qui navigue entre les deux, et qui m’a semblé plus réussi, c’est Refuge 3/9, d’Anna Starobinets.)
Ce n’est pas l’entre-deux en tant que tel qui gêne ici, mais surtout le manque de rythme qu’il paraît impliquer – en particulier dans le deuxième tiers du récit : le héros patauge, le lecteur aussi, manquant de s’enliser dans le marais. Quant à la fin,
qui n’est ni une véritable fin ouverte de roman, ni un retour à la normale de conte
, ce n’est pas le moins bon passage du récit. Le héros a changé. Le lecteur n’a pas perdu son temps, il l’a juste… employé différemment.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.
Créée
le 4 mai 2020
Critique lue 67 fois
D'autres avis sur Minnow
Minnow, dont un pêcheur traduirait le nom par blanchaille, c’est le héros de ce récit, une douzaine d’années à tout casser et pas beaucoup plus de bon sens qu’un Petit Poucet au début de l’histoire...
Par
le 4 mai 2020
Du même critique
Pratiquant la sociologie du travail sauvage, je distingue boulots de merde et boulots de connard. J’ai tâché de mener ma jeunesse de façon à éviter les uns et les autres. J’applique l’expression...
Par
le 1 oct. 2017
30 j'aime
8
Pour ceux qui ne se seraient pas encore dit que les films et les albums de Riad Sattouf déclinent une seule et même œuvre sous différentes formes, ce premier volume du Jeune Acteur fait le lien de...
Par
le 12 nov. 2021
21 j'aime
Ce livre a ruiné l’image que je me faisais de son auteur. Sur la foi des gionophiles – voire gionolâtres – que j’avais précédemment rencontrées, je m’attendais à lire une sorte d’ode à la terre de...
Par
le 4 avr. 2018
21 j'aime