Manque de crédibilité

Retour de lecture sur "N'ouvre pas les yeux" un roman policier écrit par John Verdon et publié en 2012. John Verdon, est un écrivain au profil plutôt atypique puisqu'il a pris sa retraite de publicitaire à 53 ans pour se lancer dans l'écriture. L'intrigue de ce polar démarre par l'assassinat par décapitation d'une jeune femme, Jilian Perry, le jour de son mariage avec un célèbre psychiatre. le jardinier mexicain du marié, un dénommé Hector Flores, qui disparaît le même jour, semble être le coupable idéal. L'enquête confiée à la brigade criminelle stagne, c'est ainsi que Dave Gurney, policier à la retraite est sollicité par la mère de la victime. Il accepte un peu à contre-coeur de reprendre l'affaire et devra alors louvoyer habilement entre son épouse, déjà éprouvée par une affaire précédente et qui voit d'un mauvais oeil sa reprise de service, et cette enquête qui ne tardera pas à le passionner. Ce livre démarre plutôt bien, avec une histoire qui semble de prime abord originale avec un côté un peu corrosif. J'ai beaucoup aimé les premiers chapitres, notamment l'atmosphère un peu particulière du roman. L'écriture bien que mécanique, sans grande émotion, est plaisante et on se laisse embarquer assez facilement dans cette enquête. Les personnages de ce roman sont consistants et plutôt bien définis. Les états d'âmes de ce policier et ses hésitations à reprendre l'enquête, notamment à cause de ses relations difficiles avec sa femme sont particulièrement réalistes et sonnent justes. On pardonnera à l'auteur une longueur pas forcément justifiée pour cette histoire et des scènes pas toujours nécessaires et pertinentes, la lecture gardant un côté agréable malgré cela. C'est surtout dans la deuxième moitié du roman que cela se gâte vraiment, celui-ci basculant alors progressivement dans quelque chose de très compliqué, qui perd toute originalité pour devenir très banal par rapport à ce qui s'écrit actuellement. D'une intrigue à la Gaston Leroux, on bascule dans une histoire de détraqués sexuels, de mafia et bien sûr pour compléter le tableau, d'un tueur en série. On avait déjà le cliché du psychiatre, viendront donc se rajouter une multitude d'autres. On se retrouve ainsi dans un scénario très alambiqué dans lequel on essaye d'égarer le lecteur en complexifiant l'histoire à l'extrême, jusqu'à perdre toute crédibilité. La déception principale étant l'explication du meurtre de la mariée qui frôle le comique tellement elle ne tient absolument pas la route. Il est très décevant et frustrant de lire plus de 570 pages et de finir avec un scénario aussi bâclé, totalement invraisemblable. C'est donc une lecture qui démarre plutôt bien, agréable à lire, avec des personnages intéressants, mais qui finit de manière très décevante. Tout n'est pas à jeter, mais le polar est un exercice pour lequel, avant toute chose, l'histoire doit être crédible. C'est malheureusement très loin d'être le cas ici.

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"Qu'un détail aussi mineur puisse laisser une impression sensorielle durable n'avait pas de sens. Mais peut-être que la force, la pérennité de cette impression résultaient de sa sensibilité hors du commun. L'acuité a son prix. Certainement, ce petit craquement deviendrait un jour aussi ténu dans sa mémoire que l'image de tout ce sang, qui commençait déjà à pâlir. Il était important de mettre les choses en perspective, de se souvenir que tout passe. Que chaque ondulation à la surface d'un étang finit par s'estomper."