Nirliit, c'est le nom inuit de l'oie sauvage, qui effectue le pèlerinage annuel pour le Grand Nord. Comme l'autrice, travailleuse sociale au Nunavik, région à l'extrème Nord du Québec, là où vit la communauté Inuit, et des Québécois en travail saisonnier.
Les évocations de la nature nordique sont magnifiques, un éblouissement dans les yeux de la Québécoise de la ville. Mais Nirliit c'est surtout un témoignage lyrique et âpre sur la réalité sociale des Inuits du Québec. Une réalité de violences et de désespérance, où les enfants grandissent trop vite, où l'on meurt beaucoup trop jeune de l'alcool, de la drogue, d'accidents de voiture ou de suicides. La narratrice parle à Eva, jeune femme inuit disparue, jetée dans un fjord par son amant. Une victime parmi tant d'autres d'une déchéance généralisée.
Nirliit ne tombe pas dans l'essentialisme, difficile quand on peint une réalité aussi dure et des personnages pantins, écrasés par leur histoire personnelle, et l'Histoire tout court. Cette histoire récente qui a entraîné en moins d'un siècle une foule de violences symboliques, tapies un peu partout... celles de l'État canadien qui prend puis fait louer les terres ancestrales, détruit les meutes de chiens nordiques pour obliger la sédentarisation, modifie à marche forcée des coutumes de bon sens, héritées d'un climat cruel mais familier. La fuite elle est quelque part entre l'amour et l'amitié...
C'est vraiment triste, j'ai découvert une facette du Québec dont on n'entend pas parler, j'ai adoré même si chaque page serre un peu plus le coeur.