Nirvana est sans doute le groupe qui a le plus littérature à son sujet. La très courte carrière du groupe, le fait que le groupe fut un game-changer dans la musique, enterrant le glam metal et ringardisant même la pop formatée, et a ainsi permis de redonner une vitalité au rock pendant 15 ans par la suite, le fait que tout ce qu'a fait Nirvana et Cobain semble signifiant, tout cela donne envie de disséquer le groupe dans tous les sens. On a eu des livres et des magazines avec des théories du complot, on veut décortiquer le moindre objet que Cobain a touché pour y trouver du sens avec des documentaires, ... Il manquait donc un livre qui prenne un peu de recul sur tout ça.


Michael Azerrad est un journaliste spécialiste de la scène, il a vu la scène hardcore underground se développer, il a du contenu. Et surtout il a interviewé Cobain, le groupe et tous les proches pendant de longs mois, donc on a une vision très exhaustive de Nirvana. Et dès le début, Michael Azerrad met en avant quelque chose qui est assez peu repris dans les commentaires sur le groupe : Cobain ment, il enjolive, il se contredit. Ces proches le savaient, mais les fans réinterrogent peu cela : Cobain parfois se fout de notre gueule, il brouille les pistes, et le journaliste s'en rend compte. Donc on a un peu de recul.


On a donc un ouvrage très détaillé sur Aberdeen, cette ville portuaire pluvieuse d'où viennent Cobain et Novoselic, l'histoire de tous les batteurs qui se sont succédés, le comportement des uns avec les autres, le point de vue de Grohl (ce dernier étant finalement peu bavard sur cette période dans sa propre biographie), le fait que même s'ils s'entendaient très bien, ils avaient beaucoup de dissensions, et le rythme difficile des tournées. Finalement ce qui fonctionnait bien, c'est que Novoselic et Grohl se parlaient peu de comment devait fonctionner la musique. Cobain aurait voulu davantage échanger avec eux, mais dans le même temps il avait une vision très arrêtée de comment le groupe devait sonner. Novoselic le comprend mieux que personne, et Grohl s'est rapidement adapté car ils ont la même base musicale. On a aussi dans le livre le bon sens de Cobain pour trouver les bons labels, sur la communication, le mixage, une analyse poussée du sens des morceaux.

Et enfin, on a un point de vue détaillé sur Courtney Love et la cabale médiatique autour du couple. On comprend que Courtney Love était finalement celle qui a essayé le plus fort de se sortir de la drogue, et que son fort caractère et son humour grinçant l'ont fait passer pour une mangeuse d'hommes, tout cela dû à une forme de mysoginie à mon sens. Alors que plus probablement c'est une pauvre fille, dont le mari s'est suicidé, après une longue phase d'harcèlement médiatique, de dépression et de drogues, et qu'elle a perdu les pédales après tout cela.


Azerrad a des bonnes sources et a bien investigué. La biographie initiale se terminait après la sortie d'In Utero, et on a donc un ajout de l'auteur après le suicide de Cobain. On regrettera peut être qu'il n'est pas un peu plus développé la partie post In Utero, et peut être réinterroger ses sources après la mort de Cobain pour éclairer les dernières zones d'ombre (justement le caractère légèrement mythomane de Cobain). Mais c'est une biographie sans déification du groupe, ce qui le rend finalement encore plus humain, et encore plus identifiable.

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le 19 juil. 2024

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