Premier livre de Jérémy Fel que je lis, « Nous sommes les chasseurs » est un roman massif, découpé en 10 chapitres de longueurs inégales. J'ai été assez décontenancé après le 1er chapitre de me rendre compte que les différents chapitres seraient sans lien entre eux, se lisant comme des nouvelles indépendantes. Du moins c'est ce que l'on croit au début, comprenant assez rapidement qu'il y aura un fil rouge, plus ou moins ténu, qui relie les différents fragments de ce roman.
Difficile pourtant de définir ce fil rouge, peut être le Mal, sous différentes formes, même si l'une d'entre elle revient et intrigue plus que d'autres. Les autres fils rouges qui se tressent autour de cette corde noire centrale sont plus ou moins réussi. Natalie Wood notamment reste assez incompréhensible pour moi qui ne connaissait pas cette actrice et j'ai été assez imperméable à ses apparitions, a fortiori le chapitre qui lui est consacré.
Les styles sont très changeant d'un chapitre à l'autre, balayant le passé, un présent alternatif ou un futur. Usant d'une alternance de roman policier, thriller politique, horreur, fantastique, SF, roman noir... C'est la force de ce roman, Fel passe d'un style à l'autre sans trembler et parvient à ne jamasi être ridicule, voir même venir tutoyer les plus grands dans certaines catégories (il y a du King ou du Dan Simmons et son échiquier du mal parfois ; j'ai également senti des atomes crochus avec des romans comme l'ombre du vent de Zafon).
Les personnages, point centraux du romans finalement, sont extrêmement bien écrit, parfois un peu caricaturaux, notamment pour Gabriel (qui auraient sinon été un des personnages les plus effrayants qu'il m'aurait été donné de lire).
Alors pourquoi cette note, a priori si faible ? Peut être parce que dans ce genre de roman, je préfère comprendre l'univers que les personnages. Et Fel fait le choix, à la manière d'un Lovecraft, de rester très énigmatique sur l'origine de ce Mal, ses motivations. Ses incarnations sont menaçantes mais ne s'incarnent jamais assez pour moi pour que je me sente personnellement menacé. Comme si seuls les personnages pouvaient souffrir, et le découpage en chapitre avec des personnages ne se retrouvant presque pas d'un chapitre à l'autre m'ont empêché de développer une grande empathie pour eux. Cette menace ne me concerne finalement presque pas, et deviens un éléments comme un autre, lui faisant perdre de sa superbe. Comme un fauve que l'on verrai à travers une vitre blindée. On frissonne un peu, mais en reposant le livre, on se souvient que l'on est à l'abri.
J'aurais préféré que ce livre me hante même une fois reposé. Ca n'a pas marché, et j'en suis désolé. Mais je retenterai ma chance sur un autre roman, tant le style de Fel m'a séduit, et sa capacité à embrasser tous les styles tout en développant des personnages extrêmement bien construit m'a impressionné.