On n'empêche pas un petit cœur d'aimer par Paul de Senquisse

Ici, ce n'est pas "l'histoire" mais "les histoires". Recueil de 23 micro nouvelles de 2 à 10 pages, le seul thème récurrent est celui de l'amour, décliné sous autant de variations plus dérangeantes et malsaines les unes que les autres, mais amour tout de même. Inceste, kidnappings, violences conjugales, rien n'échappe à la plume de Castillon pour nous mettre mal à l'aise. Mention spéciale aux nouvelles « Une araignée au plafond » (qui parle de famille et d'amants mystérieux), « La prunelle de mon oeil » (un genre de syndrome de Stockholm pour un homme abusé par une femme trop jalouse), « Corvée de liberté » (sur les violences en mode passif agressif), Petite femme (nouvelle horrible sur un kidnapping) et « Thérèse décline » qui est à peu près la seule nouvelle du recueil à se terminer sur une note plutôt positive et légère.

Je n'avais jamais lu Claire Castillon avant ce recueil. Ma curiosité piquée par une bonne critique dans Lire et par ce titre que je trouvais fabuleux, j'avais mis cet ouvrage dans ma wishlist et lorsqu'on me l'a offert (merci Karen) j'avais tout oublié du « pitch ». Du coup, les premières nouvelles ont été un choc, avant que je ne me glisse dans l'ambiance. Les nouvelles sont très bien écrites, le vocabulaire est dense mais agréable (quoi qu'un peu « médical » sur certaines nouvelles), et Castillon tisse avec brio une toile très large autour du spectre des dérives de l'amour. Car il y a de l'amour, indéniable, intense, dans chacune de ces nouvelles, mais c'est un amour perverti, malsain, malade. Ici, amour ne rime pas forcément avec bonheur ou avec toujours, un peu comme dans la vraie vie, en somme. En pire. Quoique... C'est le caractère réaliste de chacune de ces nouvelles (aussi extravagantes soient elles dans leurs travers) qui les rend si délicieusement dérangeantes. Parce qu'on se dit tout haut que cela n'arrive que dans les livres. Mais qu'on sait tout bas que la réalité, souvent, peut être bien plus cruelle que la fiction. Alors on continue à lire, et on espère ne jamais être l'un des protagonistes de ces nouvelles aux idées noires.
desenquisse
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le 20 mai 2011

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