Critique de Shaynning

J'ai vu cette petite série jeunesse passer entre les mains des professeurs plusieurs fois, alors , forcément, un libraire jeunesse doit savoir de quoi il retourne! C'est donc le premier tome d'une série de quatre sur un personnage de presque 12 ans, Henri Côté.

On ne peut pas le deviner, mais avec ses yeux légèrement bridés verts et sa tignasse noire et raide, le jeune Henri est le second enfant adopté de sa famille, après son aînée Marika, qu'on devine d'origine orientale. L'ennui, pour Henri, c'est que ses parents refusent de lui dire quoique ce soit sur son passé avant ses 16 ans! Même chose pour sa sœur. Alors quand on lui demande une rédaction sur son "histoire", Henri décide de l'inventer à défaut d'avoir la vérité. Bien sur, le récit hollywoodien de sa mère en espionne de la guerre froide offrant son unique enfant à son amant pour lui sauver la vie a quelque peu exaspéré son professeur. Henri aimerait bien être moins "ordinaire". Et bien, monsieur sera servi! Entre l'arrivé de la belle Béatrice pour laquelle il expérimente de nouveaux sentiments et l'arrivé de lettres étranges au contenu amoureux à la limite du grandiose, Henri nous partage le quotidien de sa famille assez hors normes et de ses amis hauts en couleur.

J'ai trouvé ce premier tome assez sympathique pour une fiction. On pense à tort que l'ordinaire est ennuyeux et que le "normal" est indigne d'attention, mais pourtant quoi de plus normal que les premiers sentiments amoureux et les angoisses qu'ils suscitent? Aussi, on a tendance à se croire soi-même sans intérêt et pourtant Henri est tout sauf ennuyeux. Fan de vieux films, un peu anxieux sur les bords, Henri a une personnalité intrigante qui se constate surtout à travers la narration. Il se raconte et il le fait d'une manière originale. Sa mère et ses fautes d'anglais ou d'expression m'auront vraiment fait rire - "Sky is the lemon!, "Ernest et Ming Way, ils étaient deux?" HAHA! Henri a aussi de bons amis, une chose que j'apprécie, car parfois les amitiés jeunesse sont surfaites ou peu profondes.

J'ai également apprécié le thème de l'amitié entre garçons et filles, qui est une sorte d’ambiguïté sociale. Le flou que peut prendre ces relations, les préjugés de genre, les changements qui arrivent à l'adolescence entre les membres du groupe d'amis, tout ça est abordé doucement. Les garçons évoquent à plusieurs reprises le fait qu'Élodie est devenue "une vraie fille", que veulent-ils dire? Pourquoi parler de "Garçon manqué" quand on ne parle jamais de "fille manqué"? On peut ouvrir des débats avec ce roman, avis aux profs!

C'est un roman de 150 pages qui se lit facilement d'une traite pour un lecteur rapide, mais qui offre aussi une belle lecture aux moins expérimentés. C'est drôle, actuel et on y trouve des thèmes assez généraux qui peuvent tous nous toucher à au moins un degré. J'aime également la plume de Patrick Isabelle.

Une lecture fort plaisante, pour un lectorat du troisième cycle primaire environ.

P.S L'auteur/rice des lettres d'amour est un(e) sacré(e) romantique!