En 2012, Martin Winckler, écrivain passionné de pop culture, sort un essai intitulé Petit éloge des séries télé. Publiée aux éditions Folio, l'oeuvre s'étend sur une centaine de pages et comporte cinq chapitres, tous focalisés sur ce format télévisuel. Commençant par un préambule visant à présenter brièvement les périodes d'âge d'or qu'ont connu les séries, Martin Winckler énumère ensuite les droits du sériephile. Si certains d'entre eux semblent évidents, le lecteur comprend par la suite la raison de leur présence dans cet ouvrage. Puis l'auteur entre dans le vif du sujet en présentant une succession de caractéristiques propres aux séries télévisées. Ainsi sont évoqués des phénomènes tels que les épisodes pilotes ou les spin-off. Il relève aussi les dissemblances entre les productions américaines et françaises (ces dernières se heurtant à plus de contraintes) et se penche, pour terminer, sur les émotions que peuvent procurer certaines des œuvres télévisuelles.
Une question, posée de manière récurrente, rassemble ces cinq parties : "Qu'est-ce qu'une bonne série télévisée ?". Mais à qui la réponse est-elle adressée ? À un spectateur novice en quête de références ? À un expert de ce format désirant approfondir sa culture télévisuelle ? Difficile d'identifier le public visé.
Quelque soit le profil ciblé, les interrogations soulevées par Martin Winckler, en deuxième section notamment ("Pourquoi les séries télé ?"), peuvent s'avérer frustrante pour le lecteur qui peine à cerner le cheminement – et donc les réponses – de l'auteur. En effet, bien que l'enchaînement des références soit nécessaire pour illustrer chaque propos tenu et que les remarques subjectives se veulent le plus souvent intéressantes, ces éléments empêchent parfois de saisir la pensée véhiculée. Les longues énumérations forment toutefois un corpus d’œuvres impressionnant et mettent en évidence la parfaite maîtrise du sujet par l'auteur. Par ailleurs, l'initiative de rassembler toutes les références en fin d'ouvrage réjouira bien des lecteurs. Cependant, Winckler ayant ses préférences, certaines œuvres reviennent de manière incessante. Bien qu'il assume pleinement ce fait, cela peut provoquer de l'agacement. À ce propos, l'écrivain s'accorde bien des digressions, ce qui vient freiner la progression de son raisonnement.
Si l'auteur parvient à présenter efficacement l'évolution des séries télévisées, son ouvrage ne semble à présent plus d'actualité. En effet, bien qu'il prédise un troisième âge d'or, les pages perdent déjà de leur blancheur. Aujourd'hui, le consommateur privilégie les plateformes de streaming telles que Netflix à l'utilisation du DVD : la démarche se veut à la fois moins coûteuse, moins lente et moins contraignante. Une réédition serait donc une initiative intéressante pour réimposer l'ouvrage dans l'actualité. D'autant que de nombreuses séries fraîchement sorties, ayant un impact sans précédent, mériteraient une analyse. Toutefois, l'initiative serait-elle utile ? L'essai fut composé pour contrer les attaques que subissaient encore ce format en France. Les mentalités ont, de toute évidence, évolué. La pertinence d'une telle démarche reste donc à prouver.
Que retenir de l'oeuvre, finalement ? Probablement les critères nécessaires à l'obtention d'une série de qualité, répétés à de multiples reprises tout le long de l'essai : « Une bonne histoire, une bonne histoire et une bonne histoire ». Si ce raisonnement semble en premier lieu intriguant, l'idée paraît mûrement réfléchie car longuement défendue. Enfin, bien que l'ouvrage regorge d'informations intéressantes à propos des séries, il convient néanmoins de s'interroger sur l'objectif qu'eut Winckler en l'écrivant : Cette oeuvre a-t-elle réellement permis de contribuer à la valorisation de ce format ?