Critique de Philippe le Bel par DCBA
à 80%; lu depuis le 30 décembre
Par
le 3 janv. 2022
Lu dans son édition originale de 1978.
Médiéviste confirmé, Jean Favier élargit ici le sujet de sa thèse (Enguerran de Marigny) pour porter un regard sur les 30 ans de règne de Philippe le Bel dans un volume d'environ 550 pages (annotations et bibliographie exclus).
L'entame du livre pourra surprendre. Jean Favier ne consacre que les 10 premières pages à décrire ce roi qui donne son titre à l'ouvrage, sans s'attacher à la moindre chronologie.
On passera les chapitres suivants à scruter en détail le conseil du Roi, l'entourage du roi, puis le royaume dans sa pluralité : campagnes et cités, féodalité et bourgeoisie. Suivront des chapitres sur les crises monétaires propres à cette fin XIIIe, début XIVe, et la difficile tenue des finances du royaume.
Au bout de 200 pages d'analyse d'une société et d'un royaume en pleine mutation, je me suis dis que le livre était bien mal nommé et qu'il méritait plus le titre de "La France de Philippe le Bel" tant le roi n'était ici que la tête d'un système que Jean Favier s'évertue à décrire dans le détail, avec, il faut le dire, un certain talent. Les amateurs de biographies en seront pour leur frais. D'autant que l'auteur évoque couramment les conséquences d'évènements qui n'ont guère été expliqués préalablement.
Subitement pourtant, la chronologie rattrape l'ouvrage avec un chapitre consacré aux conflits (Angleterre, Flandre...). S'enchaîneront ensuite, dans un tourbillon d'évènements et jusqu'à la fin du volume, conflits et réconciliations avec la papauté, diplomaties européennes, tractations de paix, séditions religieuses, inquisitions, affaire des templiers et pour finir l'approche d'une succession qui s'annonce plus difficile que prévue.
Ces 30 ans de règne montrent alors l'étendue de leur richesse en évènements fondateurs et en transformation de fond, dont les conséquences sont plus ou moins bien comprises par les contemporains. Ces 30 ans contiennent en germe les prémisses des conflits et tensions des 2 siècles à venir. En cela, Jean Favier prépare à merveille le chemin vers son ouvrage "La Guerre de Cent Ans" qui sortira 2 ans plus tard en 1980.
Si j'ai de nombreuses réserves sur l'organisation des chapitres, notamment la première partie du livre qui pourra en décourager plus d'un, rien n'est ici inutile pour comprendre la portée de ce règne qui ouvre la période du moyen âge dit "tardif". Jean Favier nous dresse le portrait d'un royaume en mutation avec une belle écriture qui ne sacrifie ni l'exactitude, ni le plaisir de lecture.
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Créée
le 15 mai 2024
Critique lue 10 fois
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