Quand l’exotisme ne suffit pas

Romesh Gunesekera, finaliste du Booker Prize en 1994, semble attirer l’attention davantage pour son origine sri-lankaise que pour ses qualités littéraires. Ce constat s’impose dès les premières pages de son roman, où une thématique prometteuse – l’instabilité politique au Sri Lanka dans les années 60 – se perd dans une écriture faible et des choix narratifs sans envergure.


Le roman raconte l’histoire de Triton, un jeune garçon engagé comme domestique pour fuir un contexte familial difficile. Au lieu d’exploiter les tensions sociales et politiques de l’époque, l’auteur s’égare dans des descriptions interminables et insignifiantes : la préparation du thé, les tâches ménagères, les détails du quotidien. Ces éléments, lorsqu’ils sont portés par une plume talentueuse, peuvent enrichir une œuvre. Mais ici, ces passages n’apportent ni profondeur psychologique, ni réflexion sur le contexte géopolitique. N’est pas Proust qui veut, et quand le style manque d’ambition, ces scènes basculent vite dans le vide.


Cette faiblesse stylistique met en lumière un problème plus large dans la sélection de certains prix littéraires. Il ne suffit pas qu’un livre traite d’un contexte exotique ou méconnu pour justifier sa reconnaissance. Promouvoir des écrivains issus de contextes sous-représentés est une démarche importante, mais encore faut-il que la qualité littéraire suive. Ici, l’écriture est plate, les enjeux dramatiques anecdotiques, et le potentiel de la thématique reste inexploité.


La réédition de ce roman, trente ans après sa première publication, confirme une tendance préoccupante dans la littérature et au-delà : celle d’un nivellement vers le bas au profit d’un effet de surface. Pour un lecteur exigeant, le fond doit primer, et ce roman rappelle que l’exotisme et les bonnes intentions ne remplacent pas une écriture à la hauteur.

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il y a 6 jours

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