Publié sur L'Homme Qui Lit :
Avec cette couverture, difficile de passer à côté de Reine de beauté, on s’imagine déjà dans ces maisons bourgeoises des banlieues américaines, ces familles parfaites derrière les façades des maisons entretenues, et pourtant cette noirceur, ces drames auquel nul n’échappe. J’ai lu ce roman en même temps que je regardais la série Little Fires Everywhere sur Amazon Prime (adaptée du superbe roman La saison des feux, de Celeste Ng) et j’ai pensé à ce parallèle amusant entre la série et le roman, celui des faux semblants d’une société si étonnante vue de nos yeux européens.
À Wrenton dans l’état du Maine, Jenny est retrouvée morte dans un bois. Son corps vêtu d’une chemise de nuit rose porte des traces de violence, elle a sûrement été violée, et dans une communauté plutôt paisible l’assassinat d’une jeune fille de treize ans, ancienne reine du beauté de son collège, plonge la ville dans la consternation. Qui a bien pu salir l’innocence d’une fille sans histoire ? Quel monstre rôde ?
Sa grande sœur Virginia mènera l’enquête avec l’inspecteur chargé de l’affaire, alors que sa famille finalement déjà très fragile est sur le point de voler en éclat. De fil en aiguille, nous découvrons à travers ses recherches que beaucoup de suspects se profilent, et que Jenny n’était pas la petite poupée dont on semble préférer se souvenir. Est-ce JP, cet intriguant marginal de trois ans son aîné avec qui elle voulait fuguer ? Est-ce Gil, ce pédophile de New-York sur lequel la police est incapable de mettre la main ? Est-ce Mark, ce professeur de mathématiques habile manipulateur qui a déjà fait des ravages auprès des lycéennes ? Est-ce sa propre sœur Virginia, un de ces samedis soir de beuverie dont elle ne garde qu’un souvenir embrumé ? Est-ce leur père, qui semble mener une double vie ? Leur belle-mère, que la folie et l’alcoolisme rendent imprévisible ?
Il y a tant de suspects et de rebondissements dans ce whodunit parfaitement maîtrisé que j’ai été surpris, chapitre après chapitre, de m’interroger à nouveau sur la possibilité que ce soit tel ou tel protagoniste qui ait tué Jenny Kennedy. Le roman n’est pas particulièrement sombre comme le serait un thriller, il n’y a pas un monstre terrifiant caché derrière les rideaux ou tapis dans les bois qui attend d’assassiner les jeunes reines de beauté. Il y a une communauté d’individus qui tous ont des failles, des secrets, des déviances, qui vivent en fragile équilibre avec ce fardeau et qui parfois, au gré des évènements qui s’enchaînent, forment un engrenage tragique et inéluctable. Un très bon polar, vous devriez adorer !
Reine de beauté, d’Amy K. Green, est publié aux États-Unis le 14 janvier 2020 chez Dutton sous le titre « The Prized Girl » . Il est publié en France aux éditions Belfond le 28 mai 2020 dans une traduction de Sarah Tardy.