Résilience par Kassyna L'Oasis Livresque

Mon avis : Dès les premières pages – que dis-je, les premiers mots ! –, nous sommes absorbés dans l’univers de Vincent. Enfermé en milieu carcéral pour parricide, il se remémore sa vie d’avant, lorsqu’il vivait avec Franck et la vieille, ces personnes qu’il ne peut se résoudre à appeler papa et maman. Alors que sa mère se prostituait sous le toit familial, Franck lui faisait subir les pires sévices : brimades, coups, torture… tout y passait ! Il a été éduqué dans la haine des « Arabes » et des « pédés », et s’il ne voulait pas être frappé encore et encore, c’est lui qui devait s’en prendre à ces êtres humains qu’on lui avait appris à détester. Mais au fond de sa cellule qu’il doit partager avec Yassir, il va découvrir que les deux hommes ont bien plus en commun que ce que l’on aurait pu penser. Aidé de Mélissa, une jeune femme qui fait des études en psychologie et qui vient lui rendre visite en prison, il va faire remonter de douloureux souvenirs et parvenir à mettre des mots sur une souffrance qu’il a toujours tue.

Quel personnage émouvant que Vincent ! Malade, car il a des problèmes de cœur et d’asthme, il est rejeté par sa famille, qui ne semble pas prêter la moindre attention à ses soucis de santé. Pire, il est leur souffre-douleur ! Quel crève-cœur que de lire cela. Franck l’appelle « l’Asperge », quand il ne l’affuble pas de surnoms encore plus dégradants, et le traite comme une réelle Cendrillon. Enfant battu, personne ne prend la peine de l’écouter ni de croire en lui, jusqu’au jour où un professeur va découvrir qu’il a un don pour la danse. Mais de cela, ses géniteurs refusent formellement d’entendre parler ! Vincent ne parvient plus à s’accepter, à reconnaître qui il est. Il aime les garçons, mais voudrait s’en empêcher, car on lui a appris que c’était mal. Pourtant, vous connaissez le proverbe, le cœur a ses raisons… Et page après page, nous allons entrapercevoir le calvaire que furent son enfance et son adolescence, ce qui l’a poussé à commettre un meurtre de sang-froid, et à paraître désormais vide de tout sentiment.

Quel livre ! Quelle écriture de Julia M. Tean ! C’est bouleversant, c’est magnifique, mais c’est aussi déchirant. Chapitre après chapitre, le cœur du lecteur se serre en découvrant davantage les souvenirs de Vincent. Certains sont remplis de violence et de haine – de la part de ses parents qui ne semblent pas l’aimer, ou encore de lui-même, lorsqu’avec ses « amis », ils rouent de coups ceux qui sont différents –, d’autres d’incompréhensions – pourquoi est-il né dans cette famille qui ne paraît pas vouloir de lui, pour laquelle il est transparent, quand il n’est pas l’objet de leur violence tant physique que psychologique –, mais il est aussi question d’amour et d’espoir : celui de voir exhausser son rêve de mener l’existence qu’il souhaite… Je pense que Vincent résonnera longtemps en moi, car Résilience fait partie de ces livres qui vous touchent tellement que vous avez l’impression d’avoir rencontré son héros, de le connaître… Il m’a paru si réel que je me suis demandé s’il était totalement fictif. C’est un récit percutant, à la fois coup de cœur et crève-cœur. Un ouvrage éprouvant, dont on ressort les larmes aux yeux, mais à lire absolument ! Une vraie pépite littéraire !

Une citation : « Il n’aime pas parler. De toute façon, ça servirait à quoi ? Personne ne l’entend, personne ne l’écoute. Il est transparent. » (3 %)

Ma chronique : https://loasislivresque.com/2016/10/20/resilience-julia-m-tean/