Suite à cette troisième lecture dans l’univers de Malazan sous la plume de Ian C. Esslemont, je crains qu’il ne maîtrise en effet pas autant l’univers que Steven Erikson. C’est d’autant plus dommage que les deux compères ont l’air de se vouer une excellente amitié qui se traduit par une coopération et une coordination sans faille.
Stonewielder raconte donc une nouvelle histoire de rivalité entre les forces de Malazan et un puissant ennemi. Cette fois-ci, il s’agit d’un des peuples qu’ils avaient naguère conquis, dont les ambitions de rébellion coïncident avec l’apparition de culte de la « Dame ». Il s’agit donc d’un récit dont les deux principales thématiques reposent sur le fanatisme religieux et la guerre. C’est entraînant et efficace, certes, mais comme j’ai souligné dans le premier paragraphe, il manque une certaine substance. Pour comparer une fois encore, Steven Erikson n’hésite pas à nous présenter des chapitres riches en action, sauf qu’au préalable il s’efforce de rendre les personnages attachants et de décrire des batailles riches en émotion, et parfois même en poésie. Ici, malgré quelques passages haletants, j’ai l’impression qu’Esslemont se contente de « décrire ce qu’il se passe ». La plume est un simple témoin des événements et non une force motrice, vibrant à l’intensité des événements. Lorsqu’on passe d’un auteur à l’autre, la différence me semble particulièrement flagrant ?
Est-ce pour autant un mauvais livre ? Non, je n’irai pas jusque-là. Car là où la forme faiblit contraste le fond. Esslemont a compris les enjeux de ce riche univers fantasy et pose une nouvelle pierre à l’édifice. Rarement un tome n’aura semblé aussi « déconnecté » de la saga principale, hormis quelques personnages faisant leur apparition, si bien que nous sommes pleinement focalisés sur les événements. Et une fois encore malgré la présence évidente d’un camp envahisseur et un autre résistant, un effort est fourni pour nous montrer de la nuance.
À défaut d’atteindre le niveau de la saga principale, certains personnages sont attachants. Kyle et Kiska font leur grand retour et leur jeunesse détonne d’autant plus parmi des personnages plus expérimentés, à l’instar de Greymane, Iron Bars, Devaleth et Nok. Et si la badass Martal, dit « la Reine Noire » (parce qu’elle s’équipe d’une armure intégralement noire) m’a bien plu par ses talents combattifs et de répartie, Ivanr est le personnage m’ayant le plus touché. Il est l’homme dépassé par la situation, à qui on attendra de trop, et qui incarne par les espoirs qu’on lui donne les messages forts de ce livre.
Si je savoure chaque livre de la saga principale, je dévore les hors-séries plus rapidement. Bonne chose ou mauvaise chose ? Je l’ignore, toujours est-il qu’à défaut de pouvoir les classer parmi mes lectures favorites, ils me permettent d’en découvrir davantage de cet univers, je suppose que c’est déjà ça.