Les Whites sont, dans le jargon de la police américaine, des coupables jamais condamnés pour leurs crimes. Des gars passés entre les mailles du filet de la justice, des gars qui s’en sont sortis blancs comme neige. Chaque flic a son White, un salopard qui l’obsède et qu’il rêve de voir enfin payer pour ses méfaits. Billy Graves ne fait pas exception à la règle. Devenu chef d’une brigade de nuit New yorkaise après une bavure, Billy reçoit un appel lui signalant un meurtre dans une station de métro. La victime n’est autre que le White de l’un de ses anciens coéquipiers. Lorsqu’un second White est éliminé quelques jours plus tard, Billy commence à se poser de sérieuses questions…
Un plaisir de retrouver enfin Richard Price six ans après l’excellentissime Frères de sang. Scénariste pour Scorsese (La couleur de l’argent) et la série The Wire, lui-même adapté au cinéma par Spike Lee (Clockers), ce peintre de l’Amérique urbaine nous emmène une fois de plus dans les rue de New-York pour décrire le quotidien peu reluisant d’un flic au bout du rouleau. Plus que sur son job, c’est sur sa vie de famille que Price se focalise. Et plus que l’enquête, c’est le portrait dressé qui intéresse, tant le romancier montre une fois de plus que chacun d’entre nous est avant tout le fruit de son environnement. Il parle ici d’obsession pour des histoires anciennes, de vengeances que l’on cherche encore à assouvir, d’amitiés à entretenir au nom du bon vieux temps, d’une filiation difficile à assumer, de casseroles sur lesquelles on a mis un couvercle mais qui continuent à bouillir et que l’on continue à traîner…
Narration nerveuse, dialogues au cordeau, réalisme impressionnant, plongée dans une ville cartographiée au millimètre, Price maîtrise, de bout en bout. Héritier talentueux de Selby et Ed McBain, ce grand romancier de New-York est aussi et surtout le chantre d’une forme de naturalisme qui n’appartient qu’à lui.