Cette fresque historique situe son action en Ulster durant la seconde moitié du XIXe siècle. Elle retrace le destin de trois familles dont les chemins s'entrecroisent, tissant des relations pétries de haine et de passion: des paysans catholiques travaillant dur pour arracher à la terre leur maigre subsistance, de riches aristocrates anglais orgueilleux, méprisants et cyniques, des ouvriers d’origine écossaise, descendants des colons presbytériens du XVIIe siècle.
Je connaissais peu de choses à l’histoire de l’Irlande et ce roman m’en aura beaucoup appris sur les terribles conditions de vie dans les campagnes irlandaises au cours de la grande famine des années 1840, sur l’exode forcé de millions de jeunes gens fuyant la misère, sur l’humiliation systématique de la population catholique, maintenue dans l’ignorance et les superstitions, sur la révolte contre l’occupant anglais et la prise de conscience nationaliste. Remontant à la conquête de l’Irlande par Cromwell au XVIIe siècle, l’auteur raconte comment les Anglais ont fait main basse sur le pays, confinant les Irlandais catholiques dans un statut de colonisés et les privant de tous leurs droits tandis qu’ils faisaient venir en Ulster des centaines de milliers de travailleurs écossais jugés plus dociles. Bref, une belle leçon d’histoire qui permet de mieux comprendre l’origine des haines et des tensions qui ont conduit les Anglais protestants et les Irlandais catholiques à s’entredéchirer jusqu’à la fin du siècle dernier.
Le revers de la médaille, ce sont ces longues digressions historiques plaquées sur l’intrigue principale et qui alourdissent le roman, freinant sa progression dramatique. Les personnages manquent parfois un peu de profondeur et de réalisme, leur manichéisme allant de pair avec une lecture orientée de l’histoire de l’Irlande. Reste que le roman nous permet de mieux appréhender les racines du conflit nord-irlandais qui faisait rage quand Leon Uris a écrit ce roman, quatre ans après le Bloody Sunday.