C'est ainsi que le chétif Swinburne décrivait Richard Francis Burton, précisant cependant:
«Pas la moindre gentillesse dans le regard. Ses mâchoires puissantes, son menton dur, lui donnent l’air d’être capable du pire.»
Sans même parler de ses invraisemblables compétences martiales et intellectuelles, le capitaine Burton, Dick, est avant tout un beau gars bien bâti, regard pénétrant, port altier, bronzage agricole, moustache de conquérant et épaules quadrangulaires.
Un gars hyper-virile qui en impose tout de suite, et pas con avec ça .
Fawn McKay Brodie, magnétisée par son sujet, dresse un bilan passionnant de la vie de ce géographe et linguiste parlant une quarantaines d'idiomes, explorateur libertin, bretteur exceptionnel, pionnier de l'ethnographie, écrivain de talent et remarquable traducteur, un humaniste de cape et d'épée qui un jour tonna: "Mieux vaut l'or, que la géographie!".
Comme d'autres, ses vieux jours ne seront pourtant pas tout-à-fait épargnés par le racisme colonial de son époque puritaine, déjà penchée sur le XIXème siècle.
La vie de Burton se lit comme le roman que Kipling ou Conrad n'ont jamais osé écrire, mais s'achève dans la grisaille d'une relation contradictoire avec son épouse dévouée, Isabel Burton, bigote pudibonde sous l'influence de laquelle le fringuant explorateur s'enkystera dans une existence bourgeoise, et qui brûlera d'inestimables manuscrits pour laver la postérité de son défunt mari…
La vieillesse est un naufrage comme disait l'autre, et si on veut avoir la classe internationale jusqu'au bout, mieux vaut partir comme un prince - c'est-à-dire assez tôt, de préférence célibataire, et le sabre au clair.
"Prototype personnel de Dieu, mutant à l’énergie dense jamais conçu pour la production en série. Il était le dernier de son espèce: Trop bizarre pour vivre mais trop rare pour mourir…" (Raoul Duke).
Tel fut Richard Francis Burton.
p.s.: Seul film potable avec Dick au générique, "Aux sources du Nil", de Bob Rafelson.