Philippe Torreton et Dominique Pinon mènent avec entrain une drôle de compagnie dans une des pièces les moins connues d'Eugène Labiche. Le style capillaire punk, les oreilles de hobbits et le décor aussi cocasse que réaliste transportent le public dés la première scène. Qui dit vaudeville, dit chanson : il se prend au jeu et chante sans pudeur des « Vive la France et l'Empereur !! » à la fin de chacun des trois actes.
Gaudiband et Blancafort sont des voisins ennemis à Anthony sous un Second Empire façon XXIème siècle. Ces rentiers se disputent sur des choses essentielles : la hauteur de la haie et les miaulements du chat. Cette situation, finalement tranquille, dégénère : Gatinais, bourgeois parisien venu marier sa fille au filleul de Gaudiband, veut les réconcilier. Il charge le fusil de gros sel et de papier, tire sur le chat pensant régler l'histoire. Sauf que le chat s'écrit : « Ah ! Sapristi ! » avant de tomber du muret, une balle dans la fesse. De là, la spirale infernale enferme le pauvre Gatinais qui se retrouve juré de son propre crime.
« Un cauchemar gai »
Entre temps, Gaudiband lègue – avant de la regretter - une part de sa fortune à ce faux fils élevé en filleul. L'enfant se retrouve avocat de la victime mais aussi enquêteur sur le crime de son futur beau-père. Celui-ci comprend que l'homme qui lui a sauvé la vie autrefois est accusé de son crime. Bref, ce vaudeville au vitriol est « un cauchemar gai » comme l'explique Jean-Louis Benoit, le metteur en scène.
Labiche saupoudre cet imbroglio d'un zeste de lourdeur sensuelle avec l'obsession de Gaudiband pour les coudes féminins ou la sexualité niaise de la fille de ferme.
Les vacheries entre les personnages, les petits vices du quotidien ne font qu'aggraver le cas des personnages, pour le bon plaisir du public. Parfois, il est gêné de trop se reconnaître dans ces arrangements de bonne conscience grossiers.
Les femmes interchangeables, les hommes colériques et mesquins, les valets roublards et les juges véreux se croisent pour dresser le tableau de la petitesse d'esprit. Le public rit de ces veuleries humaines pour ne pas en pleurer.
A l'heure où la justice française est questionnée, Jean-Louis Benoit conclue que, finalement, tout n'était pas mieux avant. La pièce amuse. Les acteurs mènent l'intrigue sans temps mort. La mise en scène renforce les quiproquos. Un pied dans le crime rend le public coupable de plaisir.
Pauline Amiel
Pamiel
7
Écrit par

Créée

le 7 févr. 2011

Critique lue 326 fois

Pamiel

Écrit par

Critique lue 326 fois

Du même critique

La Carte et le Territoire
Pamiel
6

La carte et le dérisoire

La force de La carte et le territoire est de ne pas en avoir. Le roman coule, doucement, surement. Il n'y a pas de surprise et l'auteur glisse lentement entre les genres, les chapitres. Pas...

le 22 févr. 2011

1 j'aime

Un pied dans le crime
Pamiel
7

Plaisir coupable avec Labiche

Philippe Torreton et Dominique Pinon mènent avec entrain une drôle de compagnie dans une des pièces les moins connues d'Eugène Labiche. Le style capillaire punk, les oreilles de hobbits et le décor...

le 7 févr. 2011