« Vous serez effrayés de tourner ces pages, mais vous ne pourrez pas vous en empêcher. » disait Stephen King… Et il a eu raison le bougre !
En fait, pour tout vous avouer, j’avais même peur de COMMENCER ce livre.
Outre l’histoire horrible dont il est inspiré et les critiques, parfois écœurées, que j’ai pu lire à son sujet, j’avais surtout peur de tomber sur un livre malsain, écrit simplement pour choquer, une sorte de « torture porn » littéraire… Et à mon grand soulagement, ça n’a pas du tout été le cas ! (Et je l’ai dévoré en quelques heures.)
Comme souvent, commençons par les personnages !
Concernant le protagoniste, David, bien qu’il soit légèrement remonté dans mon estime vers la fin du roman, je ne l’ai pas aimé. Voire parfois détesté. En fait, j’ai eu envie de le secouer, de le taper, de faire n’importe quoi pour le pousser à AGIR durant la totalité du roman. Mais c’est normal, c’est ce que souhaite l’auteur.
Quant à Ruth, que l’on pourrait considérer comme le principal antagoniste…
Vous vous souvenez de la mère – complétement dérangée – de Carrie ? C’est une enfant de chœur comparée à Ruth. En fait, je pense que je n’ai jamais autant détesté un personnage de ma vie. Elle est horrible. Abominable. Abject. Odieuse. Ignoble. Répugnante. Et tous les autres synonymes que vous pourrez trouver. Je pense que ça résume bien mon avis.
Par contre, pour ce qui est de Meg… Oh Meg… Je l’ai A-DO-RÉE.
Bien évidemment, face à tout ce qui lui arrive, on ne peut que s’y attacher, mais le plus cool, c’est qu’elle est forte, courageuse, intelligente. Et qu’elle ne se laisse pas faire.
On n’est pas sur une histoire à la « Cendrillon » où l’héroïne, trop gentille, (ou niaise, ou bête, comme vous préférez) se laisse marcher sur les pieds d’un bout à l’autre. Non non non. Meg essaye d’abord de se faire apprécier de sa famille d’accueil, mais quand les choses dégénèrent et qu’elle commence à se faire maltraiter, elle résiste, et pas qu’un peu.
Elle dit non, elle se défend, et elle va même prévenir la police ! C’est super rare et appréciable de lire ça dans une histoire de maltraitance infantile !
(En plus, avec ses cheveux roux, ses yeux verts, ses manières de garçon et sa situation familiale EXTRÊMEMENT compliquée, elle m’a fait penser à Beverly Marsh du « Ça » de Stephen King. Et moi j’adore Beverly.)
Malheureusement pour elle, résister ne suffira pas… Comment le pourrait-elle ? Elle est seule, face à Ruth et ses trois enfants, puis ensuite face aux autres enfants du quartier… Et puis surtout, il y a Susan.
L’adorable petite Susan, sa petite sœur, qui a gardé de graves séquelles de l’accident et ne peut plus se déplacer normalement.
Meg et Susan s’aiment, elles s’aiment terriblement… Et c’est bien ça le problème.
Ruth utilise cet amour pour leur faire du mal, et les forcer à obéir.
Quand Meg doit se faire punir et s’enfuit, c’est Susan qui prend à sa place.
Plus tard, si Meg essaye de s’échapper de sa prison la maison, Ruth menace de faire subir toutes sorte de tortures à sa sœur… Et c’est gerbant. C’est injuste. C’est insupportable. C’est tragique. C’est choquant.
Parce qu’ « Une fille comme les autres », vous l’aurez compris, n’est pas un livre qui vous fera vous sentir bien ou plein d’espoir (loin de là), mais il vous donnera au contraire un sale sentiment de voyeurisme en plus de vous donner envie de pleurer ET de fracasser des têtes.
Mais c’est parfois bien de lire quelque chose qui fait autant réagir, qui provoque des émotions aussi fortes – aussi négatives soient-elles – et qui fait peut-être réfléchir certaines personnes… Parce que oui, tout le monde sait/ est censé savoir que maltraiter un enfant, c’est vilain comme tout, mais combien de personnes ont été témoins de certaines choses et ont laissé couler de peur de s’attirer des ennuis, ou parce que les concernés étaient les « gentils voisins qui vont tous les dimanches à l’église et qui invitent au barbecue une fois par mois » ? S’il faut bien retenir quelque chose de cette histoire, c’est que les maltraitances peuvent atteindre un niveau de monstruosité inqualifiable, et qu’il ne faut jamais arriver jusque là, et agir dès qu’il y a la moindre preuve.
Il est aussi intéressant de voir le comportement de chacun des enfants, leurs manières de voir les choses : le narrateur pense au début que tout est normal : puisque Meg est une enfant et Ruth une adulte, Ruth a forcément raison non ? Et les enfants sont au début bien plus enclins à torturer Meg s’ils y sont incités par Ruth, (la figure d’autorité) avant de suivre naturellement leurs camarades, dans un bel exemple de psychologie des foules.
Et puis, il ne faut pas oublier que tout ça est tiré en très grande partie d’une histoire vraie, que presque tout ce que vous lisez s’est réellement passé, et qu’il faut parfois ouvrir les yeux sur certaines choses : non un adulte ne peut pas faire ce qu’il veut avec un enfant sous prétexte qu’il est son tuteur légal, non les enfants ne sont pas toujours de petits êtres innocents et angéliques et sont eux aussi capables du pire.
(« L’histoire vraie » est celle de Sylvia Likens, n’allez la lire que si vous avez le cœur bien accroché, mais le nom et l’histoire de cette jeune fille ne doivent pas tomber dans l’oubli. Mais sans déconner n’allez pas voir si vous êtes un tant soit peu sensible, c’est vraiment horrible.)
Bref, en résumé, j’ai beaucoup aimé (adoré ?) « Une fille comme les autres », et je pense qu’il me marquera pour un très long moment, mais c’est bien évidemment un roman que je ne recommanderais pas à tout le monde.
Personnellement, je connaissais l’histoire de Sylvia Likens depuis longtemps (un peu trop en détails à mon goût), j’ai beaucoup hésité avant d’acheter ce roman, et je m’y suis lancée en sachant ce qui m’attendais.
Si vous comptez vous lancer là-dedans, je vous conseille d’être prêts, ou vous risquez d’être vraiment dégoûtés et de ne pas voir l’intérêt de ce livre.
Allez, après cette critique si joyeuse, zou-bis hein !