Critique de la version collector (avec CD Audio et DVD de la Soirée Nolife)

Je vais être honnête avec vous : en apprenant la sortie de cette biographie il y a quelques mois, je n'avais pas prévu de l'acheter. J'avais déjà (et j'ai toujours) une pile de livres sur le Jeu Vidéo à lire dont certains que j'ai acheté depuis plus d'un an et même si je connais Double Dragon, je n'ai pas eu la présence d'esprit de m'intéresser à son créateur, Kishimoto-sensei (remarquez l'emploi du suffixe "sensei", professeur en français car depuis, j'ai bien évidemment lu cette biographie !), et j'avais dû me dire que je n'allais pas apprendre grand chose. Puis, lors de Japan Expo 2012 en juillet, je suis allé sur le stand Pix'n Love et Florent était là avec Kishimoto Yoshihisa. Il est toujours plus difficile de résister quand on est face à face et je suis sûr que Florent le sait et que c'est pour ça qu'il m'a tendu le livre en me demandant si je connaissais avec un petit sourire espiègle. Je n'ai pas su dire non.

ET GRAND BIEN LUI EN A PRIS !!!!!!!

La version collector contient le livre de près de 200 pages mais il est également accompagné d'un boîtier digipack 3 volets contenant un print dédicacé numéroté, un CD audio de 24 pistes remixées des musiques de Kunio-Kun, Double Dragon et Double Dragon II et un DVD de plus de 2 heures compilant la soirée spéciale Double Dragon diffusée sur Nolife et co-écrite par Florent Gorges. Le tout est regroupé dans un fourreau noir en carton assez épais et de toute beauté. Le moins que l'on puisse dire, c'est que chez Pix, ils ont soigné le contenant.

La vie de Kishimoto-sensei est juste hallucinante. Enfant, il était le souffre-douleur de son collège mais arrivé au lycée, il voit un film de Bruce Lee, Operation Dragon (Enter the Dragon en VO, d'où le jeu de mots pour le titre de la biographie) et il change du tout au tout pour devenir un "bosozoku", le genre de loubard que l'on voit dans le manga GTO. Et ce n'est pas un hasard si je cite un manga puisque son adolescence est un véritable manga nekketsu ("sang chaud") dans lequel tous les clichés sont présents : la volonté de se dépasser, les flammes dans les yeux, le code d'honneur, l'amitié virile chahutée... À se demander si on peut encore parler de cliché !

Heureusement pour nous, les joueurs, il va se tourner vers le Jeu Vidéo après le lycée. Elève moyen, il se tourne vers une école de design et se fait embaucher dans sa première société de jeu au début des années 80. À partir de ce moment-là a commencé une série de "Ouah, mais c'est lui qui a créé ce jeu ??!! J'y ai joué des heures durant !". Ça a été le cas pour Road Blaster (un ami l'avait sur MegaCD), pour Double Dragon évidemment mais aussi pour Kunio-kun puisque j'y jouais sur Amstrad (qu'est-ce que cette version a mal vieilli !) et les jeux de sport Nintendo World Cup et Super Spike V'ball. En interviewant Kishimoto-sensei, Florent parvient à extraire la substantifique moelle des expériences du maître au niveau de ses conditions de travail, de la façon dont il est arrivé sur ses projets (je retiendrai toujours qu’il lui a finalement suffi de lever la main pour être à la tête de Thunder Storm à 21 ans) ou des contraintes techniques de l’époque.

Bien sûr, la biographie s’étend longuement sur la période des Double Dragon supervisés par Kishimoto lui-même. Ce que j’ai apprécié, c’est qu’elle décrit les bons moments mais aussi les mauvaises passes, les développements plus houleux, les divergences de vision qu’il a eus avec sa hiérarchie et la fin de carrière plus difficile de ce grand bonhomme. A l’instar de Pajitnov, il n’a aucun revenu de la licence Double Dragon alors que d’autres, les « gérants » s’en mettent plein les poches. Certes, il dit lui-même ne pas leur en vouloir car il a été bien payé à l’époque et avoue à demi-mot qu’il était jeune et n’a apparemment pas géré sa petite fortune d’alors mais tout de même…
Comme souvent avec le style « Florent Gorges », le livre se dévore et les 200 pages richement illustrées se lisent pratiquement d’une traite. Je pense qu’il n’a même pas romancé ses notes car la vie de Kishimoto-sensei est tellement mouvementée que ça n’a pas été nécessaire. On pardonnera donc aisément les 4 coquilles disséminées sur 200 pages.

Pour agrémenter la lecture, je ne saurais trop vous conseiller d’écouter le CD Audio en même temps : rien de tel que les musiques entraînantes de Kunio-Kun pendant la découverte des affres du jeunes Yoshihisa au lycée ou la BO de Double Dragon pendant qu’on rage de lire ce qu’il s’est passé avec Double Dragon 3. « Matte ! Kono Yaro ».
Le DVD, enfin, permet de voir ou revoir la soirée spéciale Double Dragon diffusée sur No-Life le 23 novembre 2011. Présentée par Médoc, cette soirée est, dans le DVD, divisée en chapitres, 1 par émission (plus les interventions du présentateur de EXP et les petits jingles). Si les interviews de Kishimoto-sensei sont évidemment les sources de ses citations dans le livre, ce ne sont que des extraits, la version papier allant plus loin dans les détails. On pardonnera aussi l’écriture des Hidden & Magic qui sont elles aussi reprises du livre car ce n’est qu’une partie de l’énorme travail ait pour cette soirée : l’émission de Macha, Oscillations, décortique la musique mythique de Double Dragon, Compiler nous illustre l’IA des ennemis du même jeu, Extra-life propose un débat sur l’héritage du travail de Kishimoto,… Il y a même 2 émissions bonus sympathiques.

Pour les fans du maître et surtout pour ceux qui s’intéressent à l’histoire du Jeu Vidéo en général, ce livre est juste un indispensable. Comme l’écrit Florent, il est étonnant de voir un game designer comme lui assez méconnu alors qu’il a créé 350 jeux, dont plusieurs qui ont fait évoluer le jeu vidéo voire l’ont révolutionné tandis que d’autres sont passés à la postérité avec 1 seule œuvre.
sseb22
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Mes livres traitant du monde du Jeu Vidéo, Les meilleurs livres de 2012 et Les meilleurs livres sur le jeu vidéo

Créée

le 23 juil. 2012

Modifiée

le 23 juil. 2012

Critique lue 884 fois

6 j'aime

1 commentaire

sseb22

Écrit par

Critique lue 884 fois

6
1

D'autres avis sur Yoshihisa Kishimoto - Enter the Double Dragon

Yoshihisa Kishimoto - Enter the Double Dragon
William
8

Critique de Yoshihisa Kishimoto - Enter the Double Dragon par William

Peu importe qu'on s'intéresse ou non à Yoshihisa Kishimoto, cette biographie nous apprend pas mal de choses sur le développement de jeux au Japon dans les années 80/90 et sur les multiples...

le 12 août 2012

1 j'aime

Yoshihisa Kishimoto - Enter the Double Dragon
Manga
10

Critique de Yoshihisa Kishimoto - Enter the Double Dragon par Manga

Par nature, je ne suis pas un grand lecteur. Si ma compagne raffole des romans, j'ai beaucoup de mal à être tenu en haleine par un ouvrage sans images ou photos (sauf ceux sur le jeu vidéo, tel que...

le 10 août 2012

1 j'aime

1

Yoshihisa Kishimoto - Enter the Double Dragon
Chourave
8

Critique de Yoshihisa Kishimoto - Enter the Double Dragon par Chourave

Après le panégyrique en règle sur Michel Ancel, j'avais un peu peur d'aborder ce nouveau tome made in france des Grand nom du jeu vidéo (les volumes sur Takahashi Meijin et Gunpei Yokoi étaient des...

le 19 juil. 2012

1 j'aime

Du même critique

Total Recall : Mémoires programmées
sseb22
6

Comment gâcher un vrai travail de fond

Ayant prévu d'aller voir le film, je me suis repassé l'original de 1990. J'ai d'ailleurs écrit sa critique Par conséquent, les différences et les ressemblances m'ont sauté au visage. Et je pense que...

le 16 août 2012

70 j'aime

21

Piège de cristal
sseb22
9

Die Hard de cristal

J'ai toujours été un fan de cette série (bon, surtout les premier et troisième :o). Je dois avouer que le film est marqué "années 80" (cigarette à l'aéroport, arme dans l'avion, les vêtements,...)...

le 23 nov. 2010

63 j'aime

13

La Vie des autres
sseb22
9

D'une justesse désarmante

Berlin Est, 1984. Georg Dreyman est dramaturge et vit avec son actrice principale, Crista-Maria. Officiellement, Georg est fidèle au Parti mais le ministre de la culture le fait quand même surveiller...

le 24 mai 2011

57 j'aime

5