À la colonie disciplinaire et autres récits par BibliOrnitho
Sur une île tropicale, un voyageur étranger visite un camp pénitencier. Il a été convié par le nouveau commandant à l’exécution capitale d’un soldat qui s’est endormit durant son service. L’homme n’a pas été jugé, n’a pu se défendre et ignore jusqu’à sa condamnation. Le nouveau commandant n’assiste pas à la sentence si bien que le voyageur en apprend le déroulement par la bouche de l’officier chargé de l’exécution. Une machine archaïque torture le supplicié durant douze heures avant de l’achever et de jeter son corps dans une fosse creusée spécialement pour l’occasion. Au cours de ses explications, l’officier regrette avec nostalgie le commandement de l’ancien directeur. A cette époque les exécutions étaient festives. Mais les temps ont irrémédiablement changés et la machine semble vivre ses derniers instants. La présence du voyageur est d’ailleurs un signe : le nouveau maître des lieux compte sur la désapprobation de cet invité de marque pour justifier l’abolition de cette procédure inhumaine.
Kafka dénonce la torture et la cruauté des établissements carcéraux à travers cette fable cruelle et absurde. On est gêné du calme et du détachement des personnages : le condamné qui ignore son sort et qui plaisante avec le soldat qui le garde ; l’officier qui regrette avec sincérité une époque sordide et totalitaire et qui détaille le mode d’emploi de la machine d’un ton badin ; et jusqu’à ce visiteur qui – visiblement – désapprouve le procédé mais ne lève pas le petit doigt pour en stopper la marche. Une violence ici banalisée dans ce récit difficile.