Acide Sulfurique : un cadre aux résonances historiques pour critiquer un phénomène terriblement actu
Acide Sulfurique est le premier roman d'Amélie Nothomb que j'ai lu, et c'est également celui qui m'a faite tomber amoureuse du style et de l'univers si particulier de cette auteure.
Il raconte l'histoire d'une jeune femme qui se retrouve "raflée" lors d'une promenade dans un jardin public, et de la kapo Zdena qui va la harceler. Enfermée dans un camp de concentration truffé de caméras, Pannonique se retrouve l'héroïne d'un concept de télé-réalité atroce, qui élimine les candidats les plus faibles chaque jour, sans que jamais leur sort ne soit clairement énoncé.
Ce roman, c'est une réécriture des camps de déportation qui étaient en marche lors de la Seconde Guerre Mondiale, dans un contexte furieusement actuel, puisqu'aujourd'hui les programmes de télé-réalité sont très en vogue.
Ici, Amélie Nothomb pousse la cruauté à son paroxysme, jusqu'à faire participer le public en choisissant lequel des candidats connaîtra la mort. L'horreur et l'improbabilité d'une telle situation semblent à la fois dénoncer l'atrocité des pratiques nazies, mais aussi la surconsommation et le goût actuel pour un certain type de programme télévisuel. Ce que l'auteure dénonce ici, c'est la dérive d'un système, et la passivité intolérable de l'opinion publique.
Parsemé de quelques trésors stylistiques ou philosophiques, Nothomb nous livre un regard sur le monde, sur le cadeau que représente la dénomination, et comment la connaissance d'un prénom devient la clé d'une personne, et un bien précieux.
Autant vous prévenir, tout au long de ce roman, vous serez absolument scandalisé(e) de la façon dont cette situation est montrée comme normale. Et comme moi, vous aurez honte de prendre tant de plaisir à regarder des programmes tels que Secret Story.