L'indifférence ou comment maintenir l'autre dans sa dignité humaine - Petit essai de philosphie prat

Alain Cugno écrit comme il parle. Et il pense au fur et à mesure de sa parole. Ses livres, que nous recommandons d'une manière générale, se déroulent presque littéralement et comme Aristote, pédagogue marchait avec son élève, Cugno nous emmène dans une promenade qui éclaire les allées et regarde au-delà des avenues. En explorant le rapport à l'autre, Cugno reprend des thèmes avec lesquels notre société se débat: compassion, indifférence, souffrance, isolement, solidarité, lien. Mais il les traite avec le recul du penseur que le journaliste n'a pas, avec la patience de l'humaniste classique pétri de culture jésuite, loin de l'actualité, des événements et de l'impératif de l'information.
Loin de se faire propagande, le texte dense mais claire du philosophe ancien professeur reprend les idées et les notions que l'on appliquerait volontiers à la relation amoureuse pour éclairer les ambivalences et les incertitudes qui structurent notre rapport à l'autre dans la société.
Lorsqu'on a lu avant son ouvrage intitulé la Blessure Secrète, explicitement autour du couple et de la relation amoureuse, on ne peut qu'être surpris de ce retournement: la Blessure secrète livre les clés d'une philosophie pratique pour les rapports humains, et son Apologie, si elle continue de dresser cette cartographie complexe, donne les clés des relations à deux.
Autre retournement, et de taille à entendre les messages d'actualité et de bien-pensance dont on nous rabat les oreilles, l'indifférence est une vertu sociale, et plus encore, indispensable à la société.
En prenant l'exemple des "victimes" dans le système judiciaire, la démonstration brillante de l'auteur exhibe notre tendance à maintenir les victimes dans ce rôle, les empêchant de dépasser les origines de ce statut. La victime n'est plus aide à l'expiation via une compassion juste et mesurée, et elle est et reste un bouc émissaire contraint de porter les émotions et idées dont nous ne savons plus nous dépêtrer.
L'indifférence est une capacité à acquérir, tout aussi juste et nécessaire que la compassion.
ChD
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le 10 mai 2012

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