Ce roman occupe une place un peu particulière dans ma découverte des Rougon-Macquart, parce que je l'ai lu à quatorze ans... et relu vers vingt-quatre ans. Sans compter que je l'ai partiellement étudié à mes dix-sept ans ; bref, je connaissais les aventures de Denise et toute l'ambition de ce cher Mouret bien avant de m'intéresser au reste de la saga.
Il s'agit d'un de mes livres préférés. Même à l'époque où la littérature était une sorte de fardeau ponctuel pour moi, avec les délais à respecter et les évaluations surprises, j'ai trouvé un certain intérêt, voire un intérêt certain (chiasme poussif, et pas tout à fait legit) pour ce roman.
Zola s'offre tout à la création et à la vie de cette machine qui détruit et bouffe celle des autres. Son sens instinctif du descriptif, peut-être entaché par quelques mauvaises habitudes mais chaque fois pardonnable grâce à ses trouvailles sublimes, trouve ici l'une de ses expressions les plus excitantes.
Les couleurs, les odeurs, les brillances, les "fièvres" s'enchaînent dans un jeu logique, selon une mécanique aussi bien huilée que celle de Mouret.
Zola échouera un peu au jeu de l'identification avec son Lazare de La joie de Vivre un livre plus tard, mais fusionne ici parfaitement avec ce séducteur-né : il crée une machine fière et flamboyante, sournoisement charmante, pleine de ballons et de temps perdu. Un des chefs d'oeuvres de l'auteur selon moi.