Avec Aucun souvenir assez solide, Damasio réaffirme le constat que l’on pouvait faire suite à la lecture de ses deux premiers romans : c’est un génie du verbe et de la plume, écrivain de haute volée maniant la langue et jouant des mots avec un redoutable talent.


Fidèle à lui-même, on retrouve dans son recueil de 10 nouvelles cette volonté d’innover, de proposer quelque chose d’original en adoptant une écriture extrêmement riche et travaillée, au service d’un propos toujours aussi engagé.


10 nouvelles, c’est ce qu’il faut à Damasio pour balayer l’étendue de ses idées, de ses convictions et de ses questionnements, souvent emprunts d’une certaine poésie. Mais 10 nouvelles, ce sont aussi des histoires très différentes qui ne nous toucheront pas toutes avec la même intensité. Pour ma part, 3 d’entre elles m’ont littéralement scotché, transporté et bouleversé : Les Hauts® Parleurs®, So Phare Away et l’excellente El Levir et le Livre. Les autres me parlent moins et m’évoquent des sentiments allant, au mieux, de la sympathie, au pire, à la perplexité. Ma note est donc un peu vaine puisqu’elle ne reflète qu’une vague moyenne de la globalité du recueil, composés de vives fulgurances et de passages plus en creux.


Je crois aussi que l’écriture de Damasio m’a fait passer à côté de quelques nouvelles. L’omniprésente recherche du bon mot, de la métaphore, de l’expression qui tape, me donne l’impression que l’auteur se caricature lui-même. Là où l’écriture virtuose de La Horde du Contrevent côtoyait des passages plus aériens qui nous permettaient de souffler, ce format de nouvelles qui se succèdent incite à la constance dans l’excellence des tournures. Une forme de surenchère qui rend le propos parfois trop complexe à suivre. Le style nous empêche alors de saisir la poésie de l’instant, de profiter des émotions qu’il est censé faire naître. Et c’est, je pense, la raison pour laquelle certains récits m’ont paru moins captivants.


Toujours est-il que ça n’enlève rien à la qualité de l’ensemble. Damasio nous livre un recueil lourd de sens, qui pousse à la réflexion autant qu’il émeut. Un recueil qu’il est peut être préférable de lire par petits bouts plutôt que d’une traite. Et si la totalité de l’œuvre ne parlera pas à tout le monde, je crois qu’il n’y a pas de fausse note et que chaque nouvelle saura toucher une sensibilité particulière.

Gilraen
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le 30 avr. 2016

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