"La seule chose qui m'importe, M. Duigan, c'est qu'vous n'pensiez pas que je suis complètement dingue."


"J'suis désolé, M'sieur Duigan, j'avais décidé de me tirer une balle dans la tête, j'm'en suis abstenu pour ne pas vous laisser sans explications mais cela risque de vous mettre dans une situation vraiment difficile."


Non, il ne s'agit pas d'une double coquille. M. Duigan n'est pas M. Dugain mais bien un personnage du roman. C'est par cette anagramme ô combien transparente que l'auteur de "Avenue des Géants" a trouvé le moyen d'intégrer son propre récit. M. Duigan est officier de police, à la tête de la criminelle de Santa-Cruz, Californie. Sa fille Wendy va bientôt épouser un chouette garçon, Al Kenner, qu'il a pris sous son aile pour en faire un assistant profiler. Et par les deux citations qui introduisent ce billet, je veux vous expliquer qu'Al Kenner (derrière les traits duquel se cache le tueur en série américain Edmund Kemper) s'adresse d'abord à l'auteur du roman plutôt qu'au flic.


Marc Dugain a eu besoin d'écrire sur Edmund Kemper, psychopathe au QI plus élevé que celui d'Albert Einstein, un géant de 2,20m et de 140kg. A 16 ans, il abat par balle ses grands-parents et achèvera sa carrière de serial killer par le meurtre, le viol et la décapitation (dans cet ordre) de sa mère. Condamné pour dix meurtres connus, celui que l'opinion publique a rebaptisé "L'Ogre de Santa Cruz" ou encore "Le tueur d'étudiantes" est toujours vivant et incarcéré à perpétuité, l'Etat de Californie ne pratiquant pas la peine de mort. Diagnostiqué schizophrène paranoïde, Edmund Kemper a de quoi fasciner un écrivain de la trempe de Marc Dugain.


Le récit qu'il propose se lit très bien mais avec un goût de bile dans la bouche. Par certains aspects, le roman m'a rappelé la lecture de l'excellent "De sang-froid" de Truman Capote même si le texte n'a pas eu le même impact émotionnel sur moi. L'auteur s'attache à retracer le parcours du tueur et à comprendre comment cet homme est devenu un monstre au terrifiant tableau de chasse. Une enfance indescriptible, dans une misère sociale délétère et violente, peut-elle tout expliquer ?


"Avenue des Géants" est un roman remarquable facile à lire sur la forme, difficile à digérer sur le fond. Cela faisait plus de dix ans que je voulais le découvrir et je ne suis pas déçue par le voyage à moto dans les grands espaces désertiques du Montana, de l'Oregon et de la Californie.


Glaçant et brillant.

Gwen21
9
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le 17 janv. 2025

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Gwen21

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