Deuxième contact
Il ne faut pas rencontrer ses idoles, dit le proverbe et encore moins les lire, ajouterai-je. Je ne saurai situer Axiom's end tant il semble tout à fait à l'écart de la direction prise par la SFF...
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le 14 janv. 2024
Il ne faut pas rencontrer ses idoles, dit le proverbe et encore moins les lire, ajouterai-je. Je ne saurai situer Axiom's end tant il semble tout à fait à l'écart de la direction prise par la SFF américaine de ces dernières années. Je ne saurais dire si c'est un hommage sincère à la littérature young adult de la dernière décennie ou un juste un énième ego trip littéraire de vidéaste se prenant un peu trop au sérieux. Vu que le livre dont il sera question ici n'est que le début d'une saga comprenant cinq autre tomes, j'ai comme une petite tendance à pencher pour la seconde option.
On suit donc les aventures de Cora et de sa famille, vivant dans l'ombre d'un père absent, sorte de Julian Assange avant l'heure persuadé de détenir les preuves que le gouvernement américain cache un premier contact avec une mystérieuse espèce extraterrestre. L'un d'entre eux finit par capturer notre gentille protagoniste pour en faire son interprète et négocier la libération des ses petits camarades détenus par la CIA. Et en vérité, interpréter ou devrait-on plutôt dire répéter ce que lui dit l'alien en arrondissant les angles, c'est là tout ce que Cora sera autorisée à faire parce que le reste de son emploi du temps est consacré à se faire bolosser par à peu près tout le monde afin de se faire sauver les miches par la seule personne qui la respecte à peu près (et franchement, c'est beaucoup dire): ce bon vieil alien qui coche toutes les cases de la psychopathie selon les standards humains mais qui a tout de même un petit cœur qui bat sous toute cette masse post-biologico-mécanique.
Alors, certes, il y a quelques embryons de bonnes idées et l'angle linguistique, bien que moins bien développé et exploité qu'ailleurs, fonctionne bien dans les interactions entre Cora et Ampersand mais il est clairement desservi par une structure narrative qui cherche désespérément à raccrocher les wagons de ses idées les plus fortes en dépit de toute cohérence. Par exemple, comment peut-on d'un côté interroger l'impérialisme du regard face à des différences culturelles radicales et de l'autre, hasard du calendrier galactique certainement, tomber sur une race alien qui n'a pas de reproduction sexuée mais qui comprend tout à fait le concept de "il" et de "elle" dans une langue qui a pourtant un pronom neutre. Moi, je veux bien me faire embarquer dans tous les débats philosophiques de comptoir (sinon je n'aurais pas une passion aussi dévorante pour la SF) mais avec au moins un semblant de sérieux dans le propos.
Ou peut-être est-ce précisément ce qui me dérange dans Axiom's end. Ce sérieux qu'on retrouve dès la couverture, dans le titre même qui n'est pas vraiment à la hauteur du contenu. Honnêtement, la "fin de l'axiome" pour un bouquin qui aurait très bien pu être une très bonne fanfiction SF de Twilight dans laquelle Charlie aurait enfin pu occuper le haut de l'affiche en tant que dangereux lanceur d'alerte (honnêtement, ça claque non ?), c'est pour le moins audacieux. Et attention, je n'entends pas par là que les fanfictions sont une sous-littérature, juste qu'on sent assez rapidement qu'Ellis a commencé l'écriture par là et que comme on dit dans le milieu, on voit encore les numéros de série.
Ce qui me fait sincèrement penser que ce livre est en grande partie un succès d'édition plus qu'un succès littéraire et qu'il a largement plus bénéficié d'une promotion efficace que de ses qualités intrinsèques. Sentiment renforcé a fortiori lorsque je me suis demandé comment Axiom's end avait pu se retrouver aux Hugo Award aux côtés de la nouvelle épistolaire Les Oiseaux du temps ou même La Saga des Voyageurs qui ne souffre aucunement de la comparaison en terme de premier contact. Et bien figurez-vous que comme l'annonce fièrement la quatrième de couverture, Truth is a human right et la vérité, c'est que non, Axiom's end n'a jamais été finaliste des Hugo, mais du Astounding Award for Best New Writer, certes géré par les mêmes personnes mais dont les conditions d'entrée ne sont pas tout à fait les mêmes et possède d'ailleurs une fâcheuse tendance à favoriser les auteurs et les autrices qui ont connus un succès commercial rapide au détriment de celles et ceux qui ont eu une réelle influence sur le genre.
Hasard du calendrier galactique sûrement...
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le 14 janv. 2024
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