Barnabo des montagnes est une porte d'ouverture dans l'univers de Buzzari, une sorte d'esquisse du Désert des Tartares, on y retrouve tous les thèmes qui y seront développés: le temps qui passe ; l'attente diffuse d'un évènement pour justifier son existence ou purger une blessure passée ou l'issue n'est jamais celle attendue ; la solitude intérieure malgré le contact avec les autres ; l'importance de la nature (ici les montagnes). On est donc pas dépaysé, le concept est le même.
Barnabo est garde-forestier. Il ne se rend pas compte de son bonheur, contemple les sommets enneigées depuis la sombre forêt. Le temps passe tranquillement, identique. Toutes les semaines, avec deux camarades, il part garder un dépôt d'armes à feu au pied des montagnes. Un jour, des bandits font leur apparition, semblent se cacher sur les sommets jusque la inviolés. Avec son ami Berton, malgré la peur, il se lance à l'assaut des pics pour les chasser. en grimpant toute crainte l'abandonne, il ne reste plus que la montagne. Les bandits finissent par attaquer. Barnabo se voyait en héros, prend peur et agit en lâche. Il en sera banni. Mais voilà que cinq années ont passé et que les bandits refont surface: il n'est pas trop tard, Barnabo n'a plus peur, cette fois il ne tremblera pas, en les tuant il mettra fin à sa honte.
Au tout dernier moment, les bandits à sa merci, il renonce. Pour ne pas tâcher de leur sang la neige immaculée, pour ne pas troubler la sérénité que lui a apporté son retour parmi la montagne. Parce que sa vengeance n'a plus de sens, que le temps a déjà lavé sa honte. Contrairement à beaucoup de livres, Barnabo n'a pas à exécuter sa vengeance pour en réaliser la vanité.
Tout se noiera dans le temps: sa honte stupide, la corneille, le Champ
de tir, le départ de Berton. Et chaque nouveau matin verra le soleil
illuminer les crêtes. L'automne viendra, et puis la neige, plus les
chansons du printemps. Barnabo n'est pas allé dormir. La nuit passe
lentement. L'aube est proche, un autre jour va naître. La vie continue
comme partout ailleurs, sans interruption.
A réserver aux fans de Buzzati, qui sauront apprécier la marque de sa pâte dans cette fin poignante.