La première chose qui frappe à la lecture de ce court roman qui ne se lit pas si vite c'est le style de son auteur. Niveau de langage, tournure et complexité des phrases, richesse du vocabulaire et donc magie des mots savamment agencés.
AV est un grand jongleur qui arrive à donner du relief, de la profondeur à des choses très simples. Sa vision de l'adolescence est nostalgique, triste, désabusée. Adolescence qu'il ne retrouvera, que nous ne retrouverons malheureusement jamais et qui transparaît de bout en bout du récit. Cette adolescence en lutte contre les adultes redresseurs, rédempteurs implacables.
Le narrateur raconte son amitié pour Fernand Larache, dit Battling (le cogneur) en raison de sa carrure de "brute tranquille" et Manuel Feracci pour qui la vie est si limpide, tous deux lycéens comme lui dans une petite ville de province, durant l'entre-deux-guerres.
La peinture du corps enseignant, des adultes de l'époque et de leurs façons n'est pas flatteuse et certainement en lien avec la fin tragique.
Battling que l'on ne pense pas être le héros au début, que l'on ne soupçonne pas si complexe et grave nous entraîne dans le sillage de ses affres.
Pourtant on peut trouver certains passages un peu longs et contraignants. La langue de Vialatte est riche et dense et peut manquer de fluidité. L'humour y est discret, nostalgique et le surréalisme n'est pas loin. Introspection donc qui pourra paraître indigeste ou monotone à certains mais n'en reste pas moins belle et triste.