Depuis quelque temps je voulais relire les anciens Stephen King. Il faut dire que, pour certains, je les ai lus il y a plus de vingt ans. Je comptais commencer par Shining, à cause de la sortie prochaine de sa suite. Mais finalement, c'est Brume qui a ouvert les hostilités. Et j'en suis très content.
Cette critique concerne l'ensemble du recueil ; pour la nouvelle Brume elle-même, voir ici : http://www.senscritique.com/livre/The_mist/critique/7837882
Brume est le troisième recueil de nouvelles de King, après Danse Macabre et Différentes saisons. C'est aussi, à mes yeux, le meilleur.
Bien entendu, comme tous ses recueils (sauf peut-être Différentes saisons, qui est un peu à part), Brume regroupe des textes très hétérogènes, des écrits de jeunesse (L'Image de la Faucheuse est le deuxième texte que King ait vendu à un magazine) ou des récits plus matures. On a tous les formats, depuis Brume qui a plus de 150 pages à deux poèmes (Paranoïa et Pour Owen) qui font trois pages chacun. On a de l'angoisse ou de l'émotion. King fait même une incursion dans la science-fiction (Sables).
Mais finalement, c'est du Stephen King comme on l'aime. Relativement sobres (il n'y a pas vraiment de scènes d'horreur et, mis à part la nouvelle Brume, il ne cherche pas le spectaculaire), ces textes sont avant tout des plongées dans l'esprit de leurs personnages. C'est-à-dire, bien souvent, une plongée dans la folie. Le thème est très présent dans le recueil, mais ses originies peuvent être diverses : culpabilité, pétage de plomb face à une situation infernale ou... origine inconnue parfois : certains textes constituent de véritables mystères, comme les deux qui concernent le Laitier.
King, comme à son habitude, se plaît surtout à analyser la réaction de personnages ordinaires placés dans une situation extraordinaire. Comment admettre qu'un simple jouet puisse provoquer le mal et semer la mort autour de lui ? Et qu'en plus, il ré-apparaisse constamment, alors qu'on s'en est débarrassé de façon consciencieuse ? Comment réagir quand on entre en possession d'une machine qui peut littéralement changer votre vie ? Que faire lorsqu'on est naufragé au milieu d'un infini désert ? Ou sur quatre planches de bois flottant sur un lac habité par un être maléfique ?
Les nouvelles sont souvent assez longues car King s'enfonce dans l'analyse psychologique avec minutie. De plus, il est très fort pour soigner le cadre et implanter l'ambiance. Je le répète : rien qui sera horrible ici, mais beaucoup d'angoisse et de malaise.
Parmi les détails intéressants, il y a la présence de nombreux enfants. Dans certains textes, ils sont même les personnages principaux (En ce lieu des Tigres, Mémé et, d'un certain côté, Le SInge, L'Excursion ; même Le Camion de l'oncle Otto renvoie parfois à l'enfance du narrateur). On sait que Stephen King parle toujours de lui-même, de ses peurs en particulier. Hors, ces textes ont été écrits quand, étant lui-même papa, il avait peur pour ses enfants. Une peur que l'on retrouve dans de nombreux romans (Shining, ça, Charlie, Cujo, Simetierre ou, pour des ados, Christine et Carrie).
Et King sait magnifiquement bien décrire le monde de l'enfance. Les peurs enfantines, bien sûr. Mais aussi une certaine faculté à accepter le surnaturel d'une façon plus tranquille, plus évidente que les adultes.
Forcément, le niveau diffère selon les nouvelles. MIs à part Brume (qui est un bijou), on a des petites pépites comme Le Raccourci de Mme Todd, L'excursion, Machine Divine à traitement de texte, Le Radeau. Certains textes sont plus classiques mais se lisent avec un grand intérêt, comme Le SInge, L'homme qui refusait de serrer les mains (qui a une ambiance à la Edgar Poe), Nona.
J'ai beaucoup aimé le mystère qui entoure certains textes comme Le Laitier 1 ou La Révolte de Caïn.
Finalement, il n'y a qu'un texte dont je dirais qu'il est en trop, Le Camion de l'oncle Otto, qui n'est pas d'un grand intérêt et est assez mal écrit. Mais l'ensemble du recueil est d'un très bon niveau.