« C’est moi qui souligne ». Magnifique effet que de conclure son autobiographie par le titre. Il s’agit bien de cela ; l’affirmation totale de soi et une force de vie inouïe.
Nina Berberova est de ces êtres, rares, qui naissent avec une passion inébranlable de l’existence et une rage d’exister qui surmonte tous les malheurs. C’est ainsi qu’elle traverse le 20e siècle en s’exilant d’une Russie révolutionnaire, affrontant deux guerres, la pauvreté et la décrépitude de tous ses amis. A son côté, c’est toute la génération perdue de Russie que l’on retrouve. Tsvetaieva, Bounine, Akhmatova, Maiakovsky, Zamiatine, Kodhassevitch et tant d’autres sont devant nous aussi vivants que nature. Ou plutôt aussi vivant qu’ils le peuvent. Car c’est le désespoir qui les ronge tous, qui les mène au suicide pour la plupart ou au renoncement. Tous sauf Nina Berberova. Elle le dit bien elle-même, qu’elle est incapable de nostalgie, que le présent ne lui paraît jamais moins bien que le passé et qu’elle ne sait pas regarder en arrière.
Parfois mon cœur trouvait le sien trop dur mais je sentais qu’il renfermait une douceur enveloppé d’un grand courage.
Vous ne trouverez pas les codes de l’autobiographie habituel. Ici, peu de grands sentiments et de lyrisme. Une touchante pudeur enveloppe tout le livre pour celle qui dit aimer la vie bien plus encore que l’amour, bien plus que la littérature. Et c’est très bien ainsi car, vous ne sortirez pas de ce livre la larme à l’œil mais bien avec un regain de courage à l’âme.