J'ai lu ça totalement par hasard et je ne regrette pas, j'ai pris mon pied comme trop rarement. Cette pièce est absolument brillante.
J'aime beaucoup cette manière de se réapproprier l'Histoire, ici l'histoire de Caligula, pour traiter de ses propres obsessions, pour servir de décor à l'histoire que l'on veut raconter. Disons que le plaisir est double, retrouver des personnages et un contexte historique que l'on apprécie et puis surtout la vision que l'auteur calque dessus. Et je me suis régalé.
Disons que c'est admirablement bien écrit, que chaque réplique est parfaite, juste, ça en devient absolument jubilatoire de voir les interactions entre ces personnages. On voit Caligula qui a perdu la tête suite à la mort de sa sœur dont il était amoureux et pour lequel il y a cette phrase magnifique tant elle en dit long :
En tout cas, la raison d'État ne peut admettre un inceste qui prend l'allure des tragédies. L'inceste, soit, mais discret.
Et puis cette volonté folle de Caligula de se libérer, de se détacher des sentiments, quitte à tuer les gens qu'il est censé aimer, pour se prouver son insensibilité, je trouve ça formidable.
Il y a cet échange magnifique, montrant toute la folie du personnage :
Connaissez-vous le mot favori de Caligula ?
LE VIEUX PATRICIEN, prêt aux larmes.
Oui. Il le dit au bourreau : « Tue-le lentement pourqu'il se sente mourir. »
CHEREA
Non, c'est mieux. Après une exécution, il bâille et dit avec sérieux : « Ce que j'admire le plus, c'est mon insensibilité. »
Je veux dire que le personnage est génial dans sa construction, dans sa folie, surtout que tout part d'une histoire d'inceste absolument immonde au départ. Rien ne va dans ce personnage. Et j'adore sa manière d'envoyer paître les gens qui veulent l'avertir du complot, comment il les retourne par la maïeutique en leur faisant avouer qu'il n'y a pas de complot...
C'est grandiose.
Et puis les autres personnages ne sont pas en reste, notamment dans leur lâcheté et la manière avec laquelle Caligula en joue est formidable. Mais le personnage d'Helicon qui joue le confident de Caligula et qui dit qu'il n'est pas son confident mais son spectateur car c'est plus sage... ou bien sa répartie lorsqu'il dit que la nature manque parfois son coup en regardant des patriciens. Il a un flegme absolument génial, il dit qu'il ne pense pas, qu'il est trop intelligent pour ça. Il a toujours le bon mot.
Cependant malgré le plaisir certain que j'ai pris à lire ça à chaque page, malheureusement ça ne m'a pas bouleversé émotionnellement, alors bien sûr ça n'était pas le nécessairement le but, mais je suis peut-être plus sensible à une œuvre qui sera capable de me faire lâcher une petite larme ou à m'émouvoir.
En tous cas ce Caligula est un plaisir de chaque instant.