Emballée par le film, je me suis ruée sur le roman, dans sa traduction française (relativement honnête, mais je ne vais pas me priver de lire la version originale...). J'ai drôlement bien fait, car voilà un livre admirablement tourné, qui sait plonger dans la psychologie des personnages sans perdre le rythme de sa narration et brosser des portraits vivaces qui ne versent jamais dans la caricature. Les différences avec le film sont à la fois importantes (un caractère plus marqué, un voyage plus long, un métier différent, etc.) et tout à fait justifiées par la différence de nature entre la littérature et le cinéma. Deux auteurs qui possèdent parfaitement leur art, ça fait un bien fou. En fait, dans cette histoire, tout fait un bien fou : la liberté que les gens prennent en dépit de tous les interdits, l'intensité de certains sentiments, la sincérité radicale de ceux qui osent être eux-mêmes, l'absence de rancœur qui va de paire avec l'authenticité la plus pure... bref, on est loin des poses et de la vacuité parfois frénétiques qu'on nous assène sans répit depuis quelques décennies dans la création littéraire. La crise du sens qui nous affecte et me rend dingue a trouvé dans ces pages un remède qui m'est un véritable baume. Je n'avais jamais rien lu de Patricia Highsmith et je ressens ça comme un terrible loupé que je vais me dépêcher de rattraper. Son prologue achève de me convaincre que je ne vais pas le regretter.