Quel plaisir de retrouver Caroline de Bièvre dans ce second tome ! Mon engouement reste intact, même plusieurs mois après la lecture du premier volet, et j’adhère définitivement à cette héroïne qui traverse l’Histoire de France avec autant de débrouillardise, née du compréhensible besoin de survivre.
Pourtant, elle est bien troublée l’époque qui lui échoie. Certes, la Terreur s’est achevée dans le sang des bourreaux mais la situation politique française n’est guère plus brillante avec ce Directoire composé de politiciens plus prompts à défendre leurs intérêts personnels que l’intérêt général. D’autant qu’à l’intérieur comme à l’extérieur des frontières, les tambours de la guerre battent toujours leurs mesures lancinantes.
Et elle en verra encore des vertes et des pas mûres cette pauvre Caro ! Exil, bataille navale, débarquement, mission secrète royaliste, chouannerie, emprisonnement, bannissement, évasion à travers la forêt tropicale, campagne d’Italie, complots politiques, entremise bonapartiste… et au milieu de tous ces événements, avoir pour seul mérite de réussir à rester vivante et pour seule espérance de réussir à aimer et à être aimée.
Pour une fois, la quatrième de couverture n’aura pas menti, j’ai bien retrouvé le souffle du superbe "Ambre" de Kathleen Winsor. Ambre, Caroline… des femmes qui, sans angélisme, sont jetées dans la réalité dure et crue de leur époque et qui doivent tirer leur épingle du jeu, parfois en suivant la voie des compromis.
Le lecteur qui se sera laissé rebuter dans le premier tome par le caractère égoïste et capricieux de Caroline (qu’il aura alors connu à 15 ans) passera sans doute – et malheureusement pour lui – à côté de la Caroline de 25 ans, mûrie par les épreuves, exaltée par les illusions brisées, devenue pleinement femme et affirmant une personnalité moins juvénile et plus déterminée.
En trame de fond de ses aventures se dessine une période historique trop souvent négligée par les romanciers. La vision du Directoire que nous offre Jacques Laurent est très bien documentée et fort pertinente. Elle nous permet de mieux comprendre les mouvements de balancier complexes de l’après-Terreur et de mieux appréhender le coup de force du Consultat.
Bref, vous l’aurez compris, avec ce roman je n’ai vraiment pas boudé mon plaisir, ensorcelée par le style toujours aussi précis, littéraire et efficace de son auteur. Le dernier tome attend dans ma PAL mais, comme pour une sucrerie qu’on a envie de faire durer afin de mieux la savourer, je vais l’y laisser encore quelques semaines et retrouver ainsi Caroline avec encore plus d’appétit.