Pourquoi la Joconde est un chef-d’œuvre ? Question que je me suis toujours posée. Ce n'est pas un tableau que je trouve beau et mes plusieurs visites au Louvre ne m'ont jamais amené jusqu'à lui. Alors, qu'est ce qui fait que tout le monde se précipite sur ce tableau ? Pourquoi vouloir, à tout prix, le voir "en vrai" ? Petite question qui m'a amené à lire cet essai de Bernard Lahire. Sauf que lui, il parle de "la fuite en Egypte" de Nicolas Poussin. Qu'importe ma question reste la même et je cherche la réponse.
Et je l'ai trouvé dans cette ouvrage de façon brillante. Je n'exposerai pas sa théorie ici (parce que complexe et que c'est pas vraiment l'endroit) mais sa démonstration est convaincante. En remontant le fil de l'histoire, il avance pas après pas dans une argumentation rudement bien ficelée avec de nombreux exemples. La sociologie côtoie l'histoire, la philosophie, la littérature, l'anthropologie, les sciences politiques et l'histoire de l'art pour nous montrer toute la complexité de la question et nous interpeller sur nos croyances et nos certitudes.
L'ouvrage est loin d'être simple. J'avoue m'y être prise à deux fois et armée pour la seconde tentative d'un tas de feuilles et d'un crayon pour noter, schématiser, compléter, gribouiller. Bernard Lahire mobilise de nombreux concepts (entre autres la "magie sociale", les formes de sacralité, les états de fait, le politique) qui demande de certaines connaissances. De plus le livre est construit de façon assez étrange pour ma logique : il commence par de la théorie pure (sur les relations entre le sacré et la domination pour ensuite parler du lien entre sacré et art) avant de terminer sur l'exemple du tableau de Poussin. J'ai du l'attaquer à l'envers pour en arriver à bout...
En bref, certainement pas un bouquin à lire à la légère, sur la plage avec un cocktail à la main. Mais il n'empêche qu'il est éclairant.