Une cabane au bord d'un lac, à six kilomètres de Bucarest, c'est là que vit Sasho avec ses quatre frères et sa petite soeur Naya. Une vie libre et aventureuse, une existence en marge de la société. Mais les autorités décident de créer dans cette endroit sauvage une réserve naturelle, il va falloir détruire la cabane et déménager, la faune a besoin de calme pour se reproduire. Un désastre pour cette famille Tsigane.
N'hésitez pas à frapper plusieurs fois sur la couverture, insistez ! Il n'est peut-être pas facile d'entrer dans ce récit, glissez-vous-y doucement ! Et puis vous voilà emporté par l'écriture de Corinne Royer. Il y a tellement de richesses dans ce roman, une plume à la fois poétique, bouleversante, faite de rêves et de drames
J'ai ressenti beaucoup d‘affection pour les personnages, Tante Marta et son amant perdu, son grand amour de France, sa fille Monica dont les courbes envoutent Sasho, Mémé Zizi la tenancière du bar restaurant nostalgique du communisme et du règne des Ceausescu. Son fils, Andrei, cupide, lâche, arrogant, il aime l'argent facile procurée par des trafics illicites. Il y a aussi entre les lignes l'absence de Petite-Mère morte en couches et le père qui noie son chagrin et sa colère, il devient plus violent gorgée après gorgée, litre après litre. le malheur s'est invité et nul n'a été capable de le mettre dehors.
À travers la famille Serban c'est aussi l'évocation des traditions, des croyances mais aussi des souffrances de la communauté tsigane. Peuple maudit, emprisonné, persécuté sous Ceausescu et pendant la Seconde Guerre mondiale. Une réflexion sur le rapport de notre société au monde sauvage, sur la nature humaine, qui peut-être courageuse ou lâche avec les zones d'ombres de chacun.
Le récit est entrecoupé par ce voyage dans le train 877, un long monologue où les pensées de Sasho se bousculent dans une prose poétique, sauvage, débridée qui va peut-être dérouter le lecteur mais qui aboutit aux cinq dernières pages sublimes.
Un roman engagé, à lire doucement pour en apprécier toute la plénitude. de la belle littérature.