Je vais m'intéresser au tome 1 du Cycle de Chanur", intitulé tout simplement Chanur. J'ai découvert Carolyn J. Cherryh dans les années 1990 par la lecture de "Forteresse des étoiles" et j'en ai encore un souvenir prégnant. Aussi, j'ai voulu découvrir l'univers-monde que cette autrice a créé. J'ai notamment commencé la lecture de l'édition parue chez "J'ai lu" en 1983. J'ai abandonné au vu de la mauvaise traduction. Aussi, je me suis procuré le premier tome de l'intégrale parue dans la collection "Nouveaux millénaires", avec une traduction revue et corrigée.
Nous sommes à une époque indéterminée, dans un lieu également indéterminée de l'espace où se côtoient des races extraterrestres. Ces dernières ont des psychologies et bien évidemment des apparences diamétralement opposées. A noter que l'humanité est pratiquement absente de cet univers. C'est déjà un fait notable dans une science-fiction qui privilégie encore aujourd'hui un point de vue anthropocentré et colonialiste, à l'image de la série "Strange new world" que j'apprécie grandement pourtant. Si vous souhaitez découvrir une science-fiction qui privilégie les Aliens aux humains, je ne peux que vous conseiller l'oeuvre beaucoup plus récente de Becky Chambers.
Plusieurs races extraterrestres se côtoient donc autour de l'activité commerciale. C'est l'aspect qui me chagrine dans ce roman. Il n'y a pas de rapports culturels entre les races. Ces dernières demeurent dans leur ostracisme et ne se rencontrent que pour faire des affaires. On est loin des rapports plus qu'amicaux que l'on retrouve dans la série "Les voyageurs" de Becky Chambers. C'est mon rejet du capitalisme qui ressort.
Je ne vais pas m'appesantir sur les différentes races, pour simplement dire que Chanur s'intéresse à l'équipage de "L'orgeuil de Chanur", composé uniquement de femelles hani. A sa tête, on trouve une capitaine aguerrie, Pyanfar. Cette dernière se trouve à la station "Jonction" quand un événement imprévu intervient avec l'apparition d'un être inconnu. Ce dernier force l'entrée de "L'orgueil de Chanur", car son équipage rit, pour fuir une autre race belliqueuse, les Kif. Tully, comme il se nomme, a énormément de difficultés à s'exprimer. Il est apeuré. Aussi, l'équipage essaye de l'intégrer est sa vie quotidienne dans un lieu confiné et entouré de vide. Or, les Kif souhaitent le récupérer pour connaître son origine. Mais, Pyanfar refuse de le livrer et lui permet d'obtenir des papiers. En conséquence, les Kif se lancent dans une "chasse à l'homme" aux conséquences dangereuses pour l'avenir des rapports entres les différentes races qui coexistent tant bien que mal dans cet univers.
Carolyn J. Cherryh nous offre un Space Opera à l'ancienne au premier regard, avec des conflits violents entre commerçants. On a l'impression d'être revenu au temps de la « guerre de course ». Pyanfar est plus une corsaire qu'une commerçante par son comportement autocratique. Toutefois, la société d'où elle vient est violente.
Par le point de vue de Pyanfar qui va changer au fil du temps, Cherryh développe un propos féministe. Elle inverse les préjugés car chez les Hani, ce sont les femelles qui dirigent, même si elles laissent leurs mâles croire le contraire. Ces derniers sont vus comme des êtres instables, veules, trop fragiles pour supporter l'exploration spatiale ( voir la très bonne série "For all Mankind", uchronie sur les débuts de l'ère spatiale). Cherryh met sur le dos des mâles Hani tous les préjugés encore actuels malheureusement sur le rôle des femmes dans la société, pour ridiculiser les aprioris. En cela, l'oeuvre de Cherryh est progressiste. Elle mériterait d'être mise en lumière dans un monde qui devient plus en plus dystopique où des propose que l'on pensait bannis réapparaissent. Des partisans de Trump ont demandé la légalisation du viol à la suite de son élection. Abominable!