Bestiaire médiéval

Période et lieu sont assez flous, si ce n'est quelque part en Europe, dans un Moyen Âge à la fois fantasmé et très documenté. Là, Chien du heaume, une rude guerrière, jeune et plutôt laide, poursuit une quête étrange mais essentielle : apprendre son vrai nom. Elle détient de son père une hache ornée de motifs complexes, l'unique fil qui la relie à ses origines. En suivant cette piste, elle rencontre le Sanglier, chef de guerre retiré dans un château de brumes, où il accueille avec chaleur les marginaux et les gens de passages, et avec qui elle se lie d'amitié, tout en se mettant à son service.
Alors que l'histoire pourrait simplement filer sur la recherche de l'héroïne, elle s'étale en longueur, profite de larges ellipses qui installe le lecteur dans une grande proximité avec les personnages, malgré la brièveté du livre. Chien passe plusieurs hivers au château, qui sont autant de pauses dans sa quête, temps de ripailles, d'entrainement et d'ennui. Les chansons du musicien Gabriel, tout comme les récits de Regehir le forgeron, créent une atmosphère familière et douce, au milieu de la rigueur et de la dureté du monde extérieur.
Car le gros du roman est affaire de sueur, de sang, de gel, de souffrance. Le quotidien c'est la guerre, la pauvreté, la solitude des combattants, et l'écriture rend parfaitement tout cela, rugueuse, poisseuse et froide. Justine Niogret nous balance une fantasy brute, sans artifice, sans merveilleux, mais pleine de souffle, d'éclat et de bravoure.