Je ne connaissais pas du tout Benjamin même s’il semble avoir une certaine réputation. Toutefois, le titre Chinese Girls m’intriguait énormément puis il faut avouer que l’aperçu offert par Pika offrait des planches magnifiques. Et comme parfois, il en faut peu pour me convaincre, je n’ai pas vraiment hésité à acheter l’édition simple. Et c’est sans regret. Chinese Girls, c’est le genre de titre/artbook qui dépeint une satire un peu sociale et qui l’exprime de manière artistique. J’ai vraiment été très séduite.

Ce titre est disponible en deux éditions : la simple qui reste toutefois assez fournie et à un prix plus que raisonnable et la collector qui semble avoir quelques enrichissements en plus. Pour autant, j’ai trouvé que pour une édition simple, elle était assez riche justement. Celle-ci se présente tout en couleur sur du papier glacé d’un très bon effet et qui vient renforcer l’impression magnifique qui se dégage du titre.

J’ai envie de dire que quand on lit/regarde ce titre, il faut avant tout le savourer. Il ne faut pas passer vite sur les illustrations car par rapport au sommaire, il y a une certaine cohérence. Celles-ci sont réellement magnifiques, virevoltantes voire assez immersives. On a parfois l’impression que les jeunes femmes sont plus réelles que nature alors qu’il ne s’agit que de dessins. Mais quels dessins ! Benjamin saisit la beauté de la femme chinoise dans tout ce qu’elle peut avoir : les défauts comme dans « Mi-visage de Vénus » ou les contrastes comme dans « Une adolescente ». Le tout toujours retranscrit avec une émotion poignante presque palpable parfois.

Le titre joue parfaitement entre les illustrations très sincères mais aussi les textes très porteurs. On ressent une forme de révolte à travers ceux-ci avec ces femmes souvent désabusées qui ne cherchent qu’une porte de sortie. Comme le dit si bien l’artiste, il a voulu écrire un « livre sur les filles, […] pour les filles » et il arrive parfaitement à montrer une forme d’admiration pour ces jeunes chinoises qui se cherchent dans une société complexe. Il y a, en outre, une part personnelle dans cette œuvre puisqu’il n’hésite pas à dire qu’il a pu « rire ou pleurer » avec celles rencontrées ou dont il a eu des échos. Au fond, ce qui est le plus intéressant dans ce titre, c’est le fait qu’on a deux peintures : visuelle et narrative d’une certaine façon. Les chapitres où on retrouve des textes, par exemple, apportent une touche plus émotionnelle et dépeignent un peu mieux l’ambiance très mélancolique du titre. Certains sont même très longs et racontent une réelle histoire agrémentée d’illustrations aux couleurs toujours très froides. Parfois, ils peuvent avoir une forme poétique ou être rédigés en prose. Mais quoi qu’il en soit, les femmes y sont toujours belles qu’elles soient figées, prises sur l’instant ou encore en prenant la pose. Par ailleurs, on pourra noter qu’il y a une forte insistance sur les regards. On a fréquemment l’impression que ces jeunes femmes ont un regard perdu mais parfois, on pourrait aussi ressentir une espèce de détermination. Le tout toujours dans un registre très sombre. L’important, c’est surtout de ressentir ce que l’artiste cherche à rendre : une impression, un instant, une émotion, une ambiance voire un désir.

Concernant la disposition des dessins, le plus souvent, ils sont en pleine page. C’est donc un moyen d’être happé par ce qui est proposé. Ce qui pourrait être un petit reproche, c’est qu’il n’y a pas toujours un juste dosage entre les illustrations et les textes. Cela ne m’a pas empêchée pour autant d’être convaincue par le titre. Un autre petit souci, c’est que bien que l’on ressente une pointe de satire sociale, je ne sais pas si le sujet est si porteur pour des occidentaux. Pour ma part, je trouve l’approche vraiment superbe mais est-ce que tout le monde pourra se sentir concerné ? Je ne sais pas réellement. Le point de vue reste très personnel dans le fond.

Pour revenir un peu plus en détail sur les couleurs, elles se veulent vives mais ne dégagent pas forcément une impression chaleureuse. On a également l’impression qu’elles sont un peu désordonnées comme pour représenter le trouble des jeunes femmes. On retrouve surtout des couleurs primaires. Mais il y a toujours une dimension très profonde qui en ressort. On ajoutera que les décors dépeints sont aussi bien représentés. C’est toujours amené de façon à nous transpercer dans tous les cas.

Les réflexions n’en demeurent pas moins intéressantes portant sur l’amour le plus souvent mais aussi sur sa place dans la société, le bonheur ou l’envie de réussir...

Je retiendrai la phrase d’introduction qui dit tout :
« Beaucoup de filles méritent vraiment d'être "la plus belle créature du monde": quand elles se battent pour survivre dans la société, elles montrent le plus beau du corps et de l'esprit chez l'être humain. »

Cette phrase me semble très juste, surtout dans une société qui tend de plus en plus à l’égoïsme comme il le montre dans certaines histoires. Si Benjamin ne prétend pas révolutionner la société, il n’en demeure pas moins qu’il nous invite à réfléchir avec cet éclairage pertinent.

Un travail d’exception qui est proposé dans ce très bel ouvrage. A admirer sans modération !
Heyden17
8
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le 18 févr. 2015

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