Je lorgnais depuis un moment sur cet essai de Regis Debray, je m'y refusais parce que le philosophe a le don de me séduire contre mes convictions, de retourner ma petite pensée contre elle-même, de me convertir en somme, et par sa forme brillante et par son fond remarquable.


Des penseurs contemporains comme Régis Debray, qui sont capables en un souffle de deux cent pages de rendre clair notre monde abstrus, il n'y en a guère plus qu'il n'y a de fraicheur dans les universités.


Par une adroite comparaison avec l'empire romain, le philosophe rend compte de la prégnante américanisation du monde occidental, de son bouleversement idéologique (lumineuse réflexion sur les oppositions transmission et communication, espace et temps, parole et image), sans tellement s'engoncer dans un nationalisme ronflant, ou au contraire, sans s'enflammer dans une exhortation au progrès anglo-saxon.


Au vrai son propos est mesuré, sa langue est sémillante et, tandis que la seconde manie le premier avec un mouvement parfait, on se sent, une fois l'ouvrage refermé, intelligent (moment rare).


Sans manquer de fustiger les limites bien visibles du modèle américain, Regis Debray parvient, par une invite au déclin, à nous réconcilier avec les USA, ce qui à soi seul, est une prouesse.

Motherfuck
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le 23 janv. 2020

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