Incas d'école
L'empereur de l'uchronie en littérature, et il n'est pas prêt d'être détrôné, reste Philip K. Dick avec Le Maître du Haut Château qui imaginait le monde dans les années 60 après la défaite des Alliés...
le 21 août 2019
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Attiré par le script (Uchronie, le XVIème siècle, les Grandes Découvertes, la Renaissance, l’Empire Inca), j’aurais pu être rebuté par la relative faible note moyenne du site.
Certes, les principales réserves qui reviennent souvent peuvent s’entendre :
- Uchronie peu réaliste : mais n’est-il pas jouissif de pousser loin l’exercice du « What if » ? Et le mouillage des navires espagnols sur les côtes haïtiennes en 1492 n’était-il pas tout autant improbable ?
- Uchronie expéditive et style global télégraphique : là encore peut-on reprocher à un auteur de prendre des risques et de ne pas aller sur le terrain du roman fleuve ? Les différences de plumes entre la Saga Nordique, le carnet de notes de Colomb, la Chronique d’Atahualpa en Europe, le roman épistolaire More-Erasme et Atahualpa-Higuénamota, le roman picaresque des aventures de Cervantès sont autant d’appropriations très réussies de styles littéraires variés.
- Le « Name-dropping » : on a parfois l’impression que l’auteur a tourné certains évènements pour placer un Machiavel, un Vermeyen ou un Montaigne mais au final quelle érudition ! Tous les évènements, arts, sciences du XVIème y passent et sont revisités avec crédibilité et rigueur. L’ouvrage invite à explorer davantage ces univers.
- Le titre du livre : clin d'œil à un jeu vidéo de stratégie plutôt bien trouvé car au fond il s'agit bien de cela : des multiples rencontres de "civilisations".
- Vision européano-centrée : ce qui me gêne le plus ; effectivement il y avait la place de davantage se mettre vraiment dans la peau des Incas, avec leur logique de pensée, leurs croyances, leurs coutumes.
Certains passages sont truculents, p.93 :
Il sut aussi que les étrangers de naguère étaient obsédés par deux choses : leur dieu et l’or. Ils aimaient planter des croix.
Ils étaient morts jusqu’au dernier.
et imprévisibles : entre les généraux incas et les empereurs européens, on sent vite que les alliances ne vont pas durer longtemps ; il y a une vraie excitation à savoir comment tout cela va bien pouvoir finir…
En tout état de cause, ce roman ravira les amateurs d’Histoire et de géographie, d’aventure et de politique, un peu moins ceux qui en attendent des envolées littéraires. Néanmoins, les passages au Pérou, à Cuba ou encore dans la Péninsule Ibérique sont sublimes.
Finalement, le lectorat n’a-t-il pas appréhendé cette œuvre au travers du prix prestigieux qu’il a reçu (Prix de l'Académie Française 2019) ?
Pour ma part, cela me réconforte dans l’idée qu’il vaut mieux se faire une idée par soi-même, a fortiori quand le script nous attire !
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Créée
le 22 nov. 2020
Critique lue 241 fois
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