Pas un chef-d'oeuvre, mais...
Non, ce roman n'est pas un chef d'oeuvre... Pour moi, son principal défaut est son sujet, qui reste assez frivole, puisqu'il raconte les expériences sexuelles d'une jeune fille du début des années 1980.
En tant que jeune homme du début des années 2010, "Clèves" aurait pu me laisser entièrement de marbre, et pourtant je suis loin de l'avoir détesté, puisque je l'ai dévoré en seulement quatre jours (c'est probablement mon record).
Je pense que le pouvoir hypnotique de ce roman réside dans son point de vue narratif, qui donne à voir au lecteur "le fond du fond" du cerveau du personnage principal, Solange, et ce, sans aucun filtre. J'ai beaucoup ce mode d'écriture très direct, enchaînant très rapidement les lignes, ou plutôt les pensées. On est quasiment en psychanalyse avec ce personnage torturé, qui agit sans vraiment avoir de but, mais seulement dans la recherche du plaisir. La réflexion qui m'est venue à la lecture ce roman est qu'il constituerait presque une version honnête et réaliste de "La Boum", avec Sophie Marceau, puisque les deux oeuvres se déroulent à la même époque et racontent les amours d'une jeune fille... Quelques scènes de "Clèves" sont tout de même très belles et très bien écrites à mon goût, notamment celle où, rentrant d'une après-midi à la plage, assise sur la banquette arrière d'une voiture, Solange s'aperçoit dans le rétroviseur, et ne reconnaît pas la jeune fille qu'elle est en train de devenir. Ce roman donne donc un très bon aperçu de la confusion que peut constituer l'adolescence, et le chaos auquel peut ressembler la vie d'une jeune fille dans un village reculé.
Mais je dois bien avouer que la crudité des descriptions peut être assez dérangeante, et il a fallu que je m'accroche pour continuer à lire après la première scène de masturbation d'une fille âgée de tout juste 10 ans... Je ne pense pas être spécialement prude, mais je ne m'attendais simplement pas à cela! Finalement je suis passé outre, puisqu'une oeuvre d'art est sensée provoquer et faire réfléchir le spectateur/lecteur/auditeur... Mais là, la frontière avec la littérature érotique est parfois très, très mince...