Un récit passionnant et bien ficelé, alliant à merveille science-fiction et thriller pour livrer une intrigue qui s’inscrira dans la lignée du travail d’Asimov sur l’intelligence artificielle. Les thématiques abordées renvoient directement à notre société et à ses inégalités et plutôt que de nous prévenir sur les dangers de l’IA (comme beaucoup d’œuvres pop citées le font), Victor Dixen décide plutôt de l’utiliser pour mieux souligner les problèmes de notre société, n’hésitant pas ainsi à aller voir du côté de l’anticipation. L’ensemble sera plutôt fluide à la lecture, qu’on dévorera sans même s’en rendre compte, et Dixen manie très bien le suspens pour nous tenir en haleine jusqu’à la toute fin de son récit, qui cristallise l’ensemble de l’œuvre.
On sent tout le travail de recherche derrière pour s’inscrire dans un contexte le plus crédible possible, tout en gardant une petite part de spéculation scientifique propre à la SF, sans pour autant être incohérent avec le reste de l’œuvre. J’ai beaucoup aimé le développement du personnage de Roxanne au fil du récit, les différentes étapes par lesquelles elle passe et évolue, comment elle décide de prendre en main son destin et sa vie. Bien sûr, les débats sur le rôle de l’IA dans notre société, comment elle pourrait résoudre certains problèmes, quel importance lui attribuer… sont autant de sujets sur lesquels argumenter pendant des heures, mais Dixen parvient à rester succinct tout en donnant une vision globale et optimiste sur la question.
Le texte peut se découper en deux grosses parties, la première servant de mise en place de l’univers et d’introduction des personnages, la seconde partant beaucoup plus sur l’action palpitante face à la menace grandissante, le tout gravitant autour du dîner entre Roxanne et Damien Prinz, sans doute le passage le plus intéressant du livre. On pourra ainsi regretter que la première partie a quelques longueurs, ne donne pas vraiment l’impression d’avancer (alors que les pièces se mettent déjà en place) et que la plupart des personnages sont antipathiques ; quand la seconde se montrera beaucoup plus nerveuse et où on s’attache bien plus aux personnages (oui, même Apolline !). Cela crée un petit déséquilibre à la lecture, mais le tout reste assez cohérent comme ensemble pour que ça ne nuise pas.
Le seul petit défaut qu’on pourra reprocher consistera dans l’accumulation des rebondissements de dernière minute. Le mystère entourant la menace qui plane sur les Îles Fortunés est plutôt bien mené et explore différentes pistes, même si compte tenu du contexte même de l’œuvre et de son message, on devinera assez vite la solution. Du coup, si le premier rebondissement, même s’il arrive assez tôt, s’inscrit plutôt bien dans la logique narrative de l’histoire, le second, à la toute fin, vient un peu comme un cheveu sur la soupe car superflu. Ou bien il aurait fallu développer l’idée dès le départ, ou alors garder le premier rebondissement, mais pas les deux. Ça casse un peu le rythme dans le climax.
Bref, Cogito est une lecture passionnante et captivante que je ne peux que recommander à tou-te-s les passionné-e-s de SF, d’IA et qui ont dévoré le cycle des robots d’Asimov.