Encore un bel effort de Etienne Klein, cette fois sur les paradoxes en physique. Le livre est divisé en deux parties: une partie assez abstraite qui traite d'épistémologie et vise à démystifier une vision rigoriste de la science, et l'autre, plus pratique, qui nous présente des paradoxes célèbres et leur histoire. L'une comme l'autre sont très intéressantes, même si les paradoxes traités ont tous été déjà bien explicités dans de nombreux autres ouvrages.
J'ai donc préféré la première partie, plus théorique , qui nous fait réfléchir sur l'impact des paradoxes en tant qu'objets de connaissance et leur rôle moteur dans la recherche scientifique. Car Etienne Klein s'attaque à cette idée toute faite qui propose que la science soit l'accumulation d'une rationalité exacerbée , analysant froidement le réel et fronçant le sourcil à la moindre anomalie. Il nous rappelle au contraire que la pensée se meurt lorsqu'elle se transforme en doxa, c'est-à-dire en opinion commune, et que c'est dans ces gouffres logiques qu'ouvrent les paradoxes que la pensée cesse de ronronner, et crée ses plus belles avancées.
Klein nous rappelle que ce sont bien des sursauts de créativité débridée et des remises en cause courageuses de la réalité des sens qui ont construit la science moderne. Loin d'être figée dans les certitudes (comme l'est la pensée religieuse), la recherche scientifique se délecte presque de ses propres doutes. Une bonne théorie scientifique se doit d'être réfutable pour être valide et même la mathématisation de la science est en soi une ouverture vers plus de créativité, afin de décrire un réel qui échappe de plus en plus à nos perceptions communes.
La deuxième partie est standard, plus pragmatique, avec le paradoxe de la nuit noire, résolu par Edgar Allan Poe, le paradoxe EPR qui a opposé Bohr et Einstein, ou encore le fameux chat de Schrödinger. rien de bien nouveau ici, mais toujours une bonne piqûre de rappel :-)
Une chouette ouvrage, facile à lire, toujours aussi bien écrit. et que je vous recommande.