Brussolo, je lisais ses Peggy Sue quand j'étais petit et c'était tellement improbable et décalé que j'en tombais sur le cul à chacun des (nombreux) tomes de la saga.
C'est toujours un peu le cas aujourd'hui quand je retombes sur un de ses bouquins, pour le meilleur (La Nuit du Bombardier) et pour le moins bien mais sympa (L'Enfer, c'est à quel étage ?). Y'a toujours des détails complètement cintrés qui défient toutes les lois de la physique, des univers étranges qui reposent uniquement sur un principe absurde en mêlant poncifs de l'horreur et du roman d'aventure en un espèce de gloubiboulga qui reste miraculeusement très agréable à lire...
Crache-Béton, c'est l'histoire un homme très oubliable qui arrive sur une planète touristique et se retrouve prisonnier d'une station balnéaire géante tenue manu militari par des maîtres-nageurs armés jusqu'aux dents, pendant que des baleines mutantes bombardent la cité de cailloux de la taille d'un phare de Twingo qui font s'effondrer les immeubles.
C'est déjà pas mal niveau imagination, mais on croise aussi des serpents qui transforment les arbres en grenades, des chats à colorier, un monde souterrain digne de Borderlands, on croirait lire de l'écriture automatique... C'est bien construit mais y'a toujours un sursaut environnemental absurde qui sort de nulle part pour nous ramener à une partie de la carte qu'on aurait pas explorée histoire qu'on voie bien toute la ville, on dirait un jeu vidéo. Mais j'aime bien la façon dont il transforme des lieux anodins en prisons, la ville quasi-fantôme de la Nuit du Bombardier devenait un piège parce que le personnage était un enfant, là c'est encore plus délirant puisque c'est le lieu ouvert et paradisiaque qui devient lieu clos dont les métiers par définition "au service du public" sont les matons.
Et en parallèle de son univers enfantin il mêle des thèmes vraiment sombres qui sortent totalement le bouquin du rayon enfant, comme c'est souvent le cas dans ses romans de science-fiction. Ici on trouve de l'esclavage sexuel dans le monde souterrain ignoble, des gosses qui prennent des cailloux plein la tronche, même les chats à colorier deviennent des instruments pour faire du tort au héros.
C'est du Brussolo, c'est un monde à part qui se dévoile toujours le cul entre deux chaises jusqu'au twist final prévisible mais très rigolo.
C'est loin d'être excellent mais c'est tellement intriguant et déjanté que ça vaut le coup d'œil...