Un film sur la vie du pire serial-killer que l'Australie aie connue (dans le sens où c'est le plus "efficace") réalisé par un réalisateur débutant, ça avait de quoi faire peur. Surtout quant on voit des trucs comme "Acolytes" sur le même thème qui m'auraient plutôt pousser à fuir.
Et en fait c'est très bien.
Au lieu de se concentrer sur les "crimes" que nous promet le titre français (c'était joli pourtant, Snowtown tout simplement), l'histoire se tisse autour de l'influence du monstre sur un jeune homme un peu autiste, et sur son entourage qui va en payer le prix.
Le parallèle avec Animal Kingdom est difficile à éviter: deux protagonistes identiques qui suivent la même évolution dans deux environnements différents, une shaky cam qui colle au plus près de ses personnages pour mieux s'éloigner quand le paysage vaut le coup d'œil, et toujours cet éclairage grisâtre et ce ciel blanc qui donnent l'étrange impression de contempler la vie depuis un lit d'hôpital de notre bonne vieille France hivernale un jour de pluie (les tentures oranges miteuses en moins).
Pas d'Edgerton ni de Guy Pearce cependant, mais des acteurs inconnus particulièrement crédibles, dans une banlieue glauque du South australien, en compagnie d'espèces de white trash locaux, dans la famille du héros autiste qui subit sans rien dire. La mère est seule, et s'est éprise d'un gentil voisin, les gosses et les amis doivent commander leurs cigarettes par containers entiers à tel point qu'on ne se demande même plus où est passé le budget, bref tout va bien jusqu'à ce qu'un évènement particulièrement sordide vienne chambouler le tout.
Et là entre John (Daniel Henshall, impressionnant), sympathique barbu qui va aider à faire dégager le voisin à coups de cônes de glace vanilles et de têtes de wallabys sur le perron. Il devient l'ami de la famille, joue avec les gosses qui l'adorent et fait sourire la mère dépressive de temps en temps, mais va peu à peu révéler sa vraie nature, emportant avec lui le jeune héros paumé tout en restant, en apparence, dans l'optique de les aider en secret... débarrasser des nuisibles...
La ville ne porte vraiment pas bien son nom, un peu de pluie et une patinoire font le quota d'intempéries, le reste n'est que nuages menaçants. Même un peu de soleil dans le final glaçant. On dirait que la ville est perdue en plein milieu de nulle part entre quatre champs, et c'est peut-être le cas. Et tout est filmé de manière très crue, très réaliste, en particulier les scènes de meurtre rares, mais proprement terrifiantes. Le quotidien est sombre, traversé de petits moments de joie partagés autour d'un gâteau d'anniversaire, d'un camion de glace rose pâle dans un paysage tout gris, et on n'a aucune notion de temps pour indiquer combien dure ce fragment de l'histoire. Les cheveux rasés repoussent d'un plan à l'autre sans prévenir, les personnages changent, on dirait que plusieurs années passent mais on ne sait pas combien de temps prends la métamorphose du jeune héros jusqu'à ce plan final glaçant, jeu de regards lourd de conséquences qui ferme une porte sur une autre histoire qui débute, et que quelques faits en caractères blancs sur fond noir se chargent de nous résumer. John à créé un autre monstre, dans une ville fantôme, et il transporte un sac de sport noir, plein d'outils.