Les années folles... dans la dèche !
"Les années folles" qu'ils disaient... Et pourtant, la vision que nous offre Orwell dans cet ouvrage poignant, est une vision d'horreur et de putréfaction.
Entre asiles où les conditions de vie des vagabonds étaient parfois pires que dehors, et envers du décors des hôtels/restaurants parisiens luxueux cachant des cuisines monstrueuses où une certaine hiérarchie est créée, Dans la dèche à Londres et à Paris nous plonge dans le désarroi le plus total, peu avant la Grande Dépression.
Orwell réussit à merveille cette prouesse qui est de nous transporter, à travers les écrits, dans le contexte réel de son récit. Ses diètes de cinq jours sans avaler quelque bouchée de pain que ce soit nous tord les boyaux. "Un homme qui ne mange pas, ne pense plus. Au bout de trois jours, on devient juste un ventre, avec quelques organes qui gravitent autour.". "Un plongeur ne pense pas. Il n'a pas le temps de penser. Pour lui, le monde extérieur pourrait très bien ne pas exister. Paris se réduit pour lui à l'hôtel, au métro, à quelques bistrots et au lit où il dort." Sa manière de retranscrire le visage de la pauvreté à travers les figures des personnages que Georges Orwell découvre tout au long de l'histoire forme un sublime tableau.
Il instaure le malaise lorsqu'il évoque ses chambres d'hôtel miteuses infestées de punaises et où la fenêtre laisse s'introduire l'eau de la pluie, pour une humidité insalubre.
Le vagabondage et faire la manche étant condamnables de prison à Londres dans les années 1930, le vagabond est condamné au perpétuel vagabondage d'asile en asile tout en évitant de se faire pincer, comme nous le montre Orwell.
Un trimardeur, tantôt baguenaudant sur le pavé, lamentant sa vie, tentant de garder espoir et dignité, se liant d'amitié avec de semblables pauvres diables, tantôt esclave d'une cuisine d'enfer, de métiers pénibles et incapacitants à toute réflexion, réduit à une tache bien spécifique a exécuter du matin au soir.
Un excellent moyen de relativiser sur le confort sur lequel nous nous reposons, et sur la condition humaine d'un trimardeur.
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