Ce qui aurait pu être un roman attachant et puissant sur la force des sentiments et des utopies chez les adolescents, m’est en fait apparu comme un livre sectaire, qui privilégie les anathèmes haineux à la force de conviction et à la réelle envie de changer le monde.
Les parents sont au mieux des abîmés de la vie, soumis au système, ou au pire des « connards » qui se servent de leur fric pour corrompre leurs enfants. Les flics sont des « bâtards débiles » forcément sexistes, les gens d’Action directe sont des héros, et ceux qui ne pensent pas comme le petit groupe de « rebelles », ou du moins qui ne partagent pas leurs modes d’action, sont des abrutis entassés dans des cages à lapins qui n’ont même pas la lucidité de se rendre compte qu’ils sont minables…
Même si je partage certains constats et points de vue évoqués dans ce livre, je n’aime pas qu’on m’assène des leçons et des clichés à longueur de pages (la sœur bobo, le voisin du squat, les profs, le petit patron…), et malgré les indéniables qualités d’écriture de l’auteur,j’ai eu beaucoup de mal à avoir de l’empathie pour ses personnages qui, certes, ont « la rage », mais sont finalement assez passifs et peu inventifs malgré leur rébellion.
C’est pour moi la limite de cet ouvrage : l’auteur nous présente ces jeunes comme des passionnés, mais le mépris et l’intolérance qu’ils manifestent ne peut tenir lieu de seule
idéologie. Quels rêves ont-ils pour la société, quel monde veulent-ils (à part vivre en communauté dans un squat) ?
Je ne demandais qu’à être convaincue et j’aurais aimé être emportée par la fougue de ces adolescents, mais trop d’esprit de sérieux et d’auto-célébration ont eu raison de mon intérêt
pour leur lutte.
Caroline
L’auteure réussit à nous immerger dans cette ambiance à la fois légère de déconne, mais aussi de révolte et de réflexions sur un autre monde possible. On sent vraiment toute la chaleur humaine. C’est un récit bien d’actualité, toujours, même s’il vient de plus loin. Beaucoup de belles idées, de façons de lutter, de réflexions politiques sont présentes dans ce roman. Ces jeunes font plaisir à voir, ils ne se résignent pas. Le livre n’occulte pas la difficulté des luttes, ni les bavures policières, mais il y a en balance le groupe qui embarque, l’amour qui transporte, qui le rend lumineux. C’est un récit qui a de la saveur, qui embarque. On peut parfois le penser un peu idéalisé et en même temps il sonne si souvent juste et réaliste. On découvre (ou pas) une part de la vie de chaque personnage et de leurs blessures. C’est un roman bien écrit, qui montre une jeunesse oscillant entre rage et espoir, qui défend ses idéaux, qui se cherche, qui a de l’énergie. Les sentiments sont très bien décrits. On partage tour à tour leur enthousiasme, leur rage, leur impuissance. Les personnages évoluent, sans changer radicalement. C’est un livre beau et fort, qui m’a infiniment parlé, à la fois coup de poing et caresse. Je manque de mots pour dire la justesse, l’émotion et la nostalgie que j’ai ressenti à sa lecture. Il touche quelque chose de très personnel, mais il pourra je pense aussi toucher d’autres jeunes adultes d’aujourd’hui. Il donne envie de lever à nouveau le poing (et de se lever tout court), il est plus que salvateur dans le contexte actuel.
Sandra